Centenaire : inégalités par la mathématique

Si l’on examine les résultats aux concours des grandes écoles en 2009, on constate, comme les années précédentes, que le pourcentage de filles est très faible en MP ou MPI.

  • ENS Paris : 2 sur 42
    soit 5% et pour ceux qui peuvent intégrer 6 sur 68, soit 9%,
  • ENS Cachan : 2 sur 27
    soit 8% et pour ceux qui peuvent intégrer 5 sur 58 ,soit 9%,
  • ENS Lyon : 3 sur 28
    soit 10% et pour ceux qui peuvent intégrer 4 sur 59, soit 6% ,
    globalement pour les ENS 15 sur 185, soit 7%,
  • École Polytechnique : 5 sur 106
    soit 5%

Que peut aujourd’hui l’APMEP pour promouvoir une véritable égalité des chances garçons-filles, hommes-femmes en mathématiques de la maternelle à l’université ?

La Révolution de 1789, sous l’impulsion de D’Alembert, a décrété l’égalité des chances pour l’instruction ; Olympe de Gouges a complété les Droits de l’Homme par les Droits des Femmes mais cela lui a coûté la vie.

Peu à peu, les droits des femmes ont diminué d’année en année ; l’Empire et la Restauration ont renvoyé les femmes à la maison pour qu’elles assurent le quotidien de ces messieurs et nous en sommes aujourd’hui encore là. Quant à Napoléon, vers 1808, il a supprimé les quelques internats de filles qui avaient pu se maintenir malgré l’ambiance sociale…

Les inégalités se sont maintenues pendant plus d’un siècle.

La relecture des bulletins de l’APMEP montre que nos prédécesseurs ont souvent manifesté auprès des ministres et, par leur action, ils ont diminué les inégalités.

Dans les années 1920 et suivantes, ils ont obtenu la suppression de l’épreuve sur un « sujet de morale et d’éducation » à l’agrégation féminine de mathématiques et à l’entrée à l’ENS de Sèvres.

Cette relecture permet de voir la patience et la ténacité de nos prédécesseurs devant la lenteur du ministère de l’Instruction Publique pour que les jeunes filles puissent accéder aux classes de mathématiques élémentaires des lycées de garçons. Ces classes n’ont vu le jour dans les lycées de filles qu’après la guerre 1939—1945.

La situation actuelle, signalée au début, est l’héritage des freins créés par les us et coutumes.

Membre de l’APMEP depuis 1957, je n’ai sans doute pas su me motiver assez, ni motiver les autres membres pour que l’égalité des chances en mathématiques existe.

Voici quelques anecdotes qui montrent la difficulté du problème.

  • En 1989, lors des Journées Nationales(JN) de Paris, pour le bicentenaire de la Révolution, nos collègues avaient fait venir une Ministre pour animer une table ronde sur les filles et les mathématiques. 150 personnes assistaient ; notre Ministre a surtout été interpelée par nos collègues femmes sur leurs soucis au quotidien : crèches, garderies,… Beaucoup d’hommes étaient présents, ils ne se sont pas manifestés. L’avenir des filles en mathématiques n’a pas été discuté. J’ai constaté que les pesanteurs sociales actuelles ne favorisent pas l’égalité.
  • Lors d’autres JN, un collègue enseignant en terminale E m’a dit qu’il n’incitait pas les filles à venir dans cette classe, car, à cause de leur sexe, elles ne trouveraient pas d’emploi.
  • Aux JN d’Orléans, Véronique Lizan, actuelle Présidente de Femmes et Mathématique, animait 2 ateliers, l’un concernant les mathématiques et les filles, l’autre avait un thème mathématique, le premier n’a attiré que moi, alors que le deuxième a fait le plein. Pourquoi les professeurs présents aux JN, femmes et hommes, ne se sentent pas intéressés par la relation filles—mathématiques ?

Et l’APMEP , que fait-elle pour l’égalité des chances : filles—garçons, hommes—femmes ?

Tous les ans je scrute les attendus de l’APMEP d’hier à demain dans la brochure annuelle « Visages de l’APMEP », ce problème de l’égalité n’est pas soulevé.

De 1982 à 1995, j’ai essayé de motiver les responsables par des textes publiés dans PLOT ou dans le BGV, ce qui ne m’a pas toujours valu que des compliments ; peut-être ai-je été maladroit ?

La mixité des grands concours a conduit certaines de nos collègues à créer l’Association Femmes et Mathématiques, dont les relations avec l’APMEP sont pourtant assez bonnes.

Actuellement, par l’action : « Ouvrons Les Portes (OLP) », cette association [1] avec d’autres, mène une action pour aider les filles dans la préparation aux grands concours. L’APMEP n’a pas participé à l’initiative ; je le regrette, car cette action est dans le droit fil de celles menées dans les années 1920 pour la suppression des discriminations pour les filles et les femmes dans l’enseignement mathématique.

Tant que nous ne ferons rien pour aider les filles, nous aurons toujours les résultats signalés plus haut.

Tant que nous ne ferons rien pour aider les femmes mathématiciennes, nous n’en n’aurons toujours que 10% dans les instances dirigeantes pour la mathématique.

Pour une femme, c’est souvent la galère pour avoir une promotion au niveau de l’Université et de la Recherche. Comment notre APMEP peut-elle aider pour supprimer ces discriminations ?

« Il n’existe pas de différence liée au sexe dans l’aptitude aux mathématiques. » selon une analyse publiée par Nicole Else Quest, professeur de psychologie à l’Université de Villanova (Pensylvanie) : la supériorité présumée des garçons n’est qu’une illusion statistique ; est-ce que l’APMEP ne pourrait pas profiter du centenaire pour mettre en place une nouvelle commission : Supprimons les discriminations en et par la mathématique ?

Fait à Limoges, le 8 mars 2010, la journée des femmes (1 sur 365)
Roger Crépin
  • Adhérent à l’APMEP et à Femmes et Mathématiques,
  • Animateur de l’Association « Pour une éducation non sexiste » pour participer après 1981 :
    • dans les collèges et lycées au programme de l’Europe pour l’action »Pour une orientation des filles vers les sciences et les technologies nouvelles » (1985—1990),
    • à l’animation ou la création de PAF et PNF pour la formation des enseignants à l’égalité des chances à l’école (1982—1993)
    • à la Commission Ministérielle avec Femmes et Mathématiques, Femmes et Sciences, Femmes ingénieures pour l’Orientation des filles jusqu’à sa suppression avant la fin du XXe siècle.

 

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