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Editorial du Bulletin 440 Quelle formation en mathématiques, vulgariser ou former ?

Nous ne répéterons jamais assez que les mathématiques sont un outil essentiel et
spécifique pour structurer l’esprit, assurer les bases et la réflexion dans de nombreux
domaines de connaissances et, plus généralement, accéder à une meilleure
compréhension du monde. Elles sont aujourd’hui omniprésentes, de façon visible ou
cachée, dans des secteurs de plus en plus nombreux de notre société, laquelle devrait
avoir un besoin croissant d’enseignants et de cadres moyens et supérieurs dans un très
proche avenir.

La place et le rôle des mathématiques dans l’enseignement secondaire
devraient donc en être renforcés. Au lieu de cela, les horaires de leur enseignement
sont réduits au collège et au lycée, leur utilité a été sévèrement mise en cause par un
ministre de l’Éducation et l’on tente de faire croire que leur apprentissage peut passer
par l’interdisciplinarité
 [1]. Les responsables ministériels font la sourde oreille aux
observations, suggestions et revendications de l’APMEP ou les écartent pour des
raisons douteuses et parfois surprenantes. Par exemple, le directeur de la DESCO
affirme qu’il n’y a pas d’inconvénient à ne pas traiter la totalité du programme,
qu’une présence suffisante des mathématiques dans les TPE relève de la
responsabilité des professeurs qui nie ainsi l’autonomie offerte aux élèves.

Alors que
l’on s’inquiète, au plus haut niveau, de la désaffection des jeunes pour les études
scientifiques, on rejette la proposition de l’APMEP de créer une option sciences de
détermination en seconde susceptible de créer des vocations.

Pourquoi notre souci d’une formation mathématique de qualité pour le plus grand
nombre d’élèves, rencontre-t-il si peu d’échos du côté des décideurs ?

La rectrice de
Toulouse, chargée par le ministre d’un rapport sur le lycée, son avenir et les moyens
de réhabiliter les filières générales du baccalauréat, n’a pas daigné recevoir une
délégation de l’APMEP souhaitant pourtant lui faire des propositions.

La lecture de
son rapport « 30 propositions pour l’avenir du lycée » apporte des éléments de
réponse. Les besoins du marché de l’emploi, nécessiteraient de 10 000 à 16 000
bacheliers supplémentaires chaque année. Pour accroître la proportion de bacheliers,
« il faut indiscutablement travailler sur la capacité à attirer les jeunes et à les garder »
dans les lycées. Il faut aussi que «  la moitié d’une génération ait un diplôme de
l’enseignement supérieur
 ». Atteindre de tels objectifs nécessite de gros moyens … à
moins que l’on ne décide de sacrifier la qualité de la formation.

L’apprentissage des
mathématiques nécessite du temps et des efforts de la part des élèves, la formation
est coûteuse et difficile pour quelques-uns, il est donc tentant de réduire le rôle de
cette discipline. Ce que l’auteur du rapport justifie, pas seulement pour les
mathématiques, en affirmant que la «  culture portant sur les savoirs traditionnels, de
type savant
 » doit être remplacée par des « compétences » et des «  aptitudes ».

Comme s’il n’y avait aucun lien entre compétences et connaissances !

Comme si l’on
pouvait développer l’un sans l’autre ! Pour tenir compte « des évolutions de la
science et des transformations du public scolaire, il faut apprendre à articuler et non
pas à juxtaposer les disciplines
 ». Ainsi, la promotion des travaux interdisciplinaires
permet de justifier la réduction du rôle des disciplines, et celle des sciences
expérimentales la réduction du rôle des mathématiques.

On comprend mieux pourquoi l’APMEP qui s’entête à revendiquer les moyens de
donner la meilleure formation possible en mathématiques, et implicitement de
développer le maximum de compétences chez le plus grand nombre possible
d’élèves, est si peu écoutée actuellement. Le type de formation que l’on attend que
nous donnions à nos élèves ne va pas dans cette direction. Les mathématiques que
l’on veut nous faire enseigner ne semblent plus avoir pour objectif une certaine
initiation au savoir savant mais une certaine « vulgarisation ». Pour des raisons
d’économie, pour faciliter l’accès aux diplômes au plus grand nombre, la tentation

  1. est grande d’abandonner les exigences relatives aux connaissances, de se limiter à
  2. l’acquisition de « compétences  ». Or les connaissances « approximatives » ne
    suscitent pas l’intérêt des élèves et ne développent pas des compétences mais l’art du
    flou.

L’à-peu-près est un obstacle à la compréhension, même des choses les plus
simples, il ne permet pas de saisir les nuances, d’accéder à la finesse, de distinguer
l’essentiel, il laisse l’individu à l’état grossier, il n’est porteur d’aucune formation, il
ne développe pas l’intelligence. Est-ce ainsi que l’on entend former les citoyens de
demain ?

Foix, le 4 mai 2002

Notes

[1Rappelons que l’APMEP n’est pas hostile aux activités interdisciplinaires ; elle estime
qu’elles participent à la mise en culture des connaissances, mais pas ou trop peu aux
apprentissages.

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