Lettre au ministre sur l’enseignement scientifique en lycée professionnel

M. BELLOEIL R.
Président de l’A.P.M.E.P.

à

M. MÉLENCHON
Ministre de l’Enseignement Professionnel
107, rue de Grenelle
75007 PARIS

Rennes, le 08 juin 2001

objet : l’enseignement scientifique en lycée professionnel

Monsieur le Ministre,

Notre association regroupe les enseignants de mathématiques de tous les niveaux et de tous les types d’enseignement, et en particulier les enseignants de « maths-sciences » des lycées professionnels. Elle s’est toujours attachée à promouvoir une formation mathématique de qualité adaptée au public de l’enseignement professionnel.

Or cet enseignement a été régulièrement délaissé par les ministères successifs. Nous avions eu un espoir d’amélioration l’année dernière lors d’une rencontre au mois de janvier avec Madame Catherine MOISAN ; elle nous a paru très au fait des difficultés et des particularités de cet enseignement et nous a consulté sur une définition d’un socle de savoir minimum en vue de déterminer enfin de nouveaux programmes de mathématique pour les C.A.P.

Depuis, nous n’avons plus d’information, et nous en sommes à nous demander, au vu des restrictions d’horaires imposées cette année, si l’enseignement scientifique a encore une place dans les lycées professionnels.

Voici les questions qui nous préoccupent :

 

Les programmes

Les C.A.P. recrutent des élèves sortant majoritairement de troisième de S.E.G.P.A. pour préparer leur diplôme en deux ans avec des programmes inadaptés.

Nous sommes scandalisés par cet état de fait qui démontre un véritable abandon des milliers d’élèves qui préparent le C.A.P., alors que les changements de programme des lycées d’enseignement général ont changé plusieurs fois : il est indispensable et urgent d’écrire des programmes adaptés aux élèves de C.A.P., à l’évolution des programmes de collèges et de lycées et à l’évolution de l’environnement technologique dans lequel ces jeunes devront évoluer. Notre association pourra apporter sa réflexion et son expérience à ce chantier.

La situation est la même pour les programmes de B.E.P. qui datent de 1992. La continuité des apprentissages n’est plus assurée.

 

Les horaires

Nous sommes très inquiets de la diminution des horaires de l’enseignement scientifique alors que Madame MOISAN nous avait assuré que les diminutions porteraient essentiellement sur l’enseignement professionnel et qu’elle souhaitait fournir aux élèves des lycées professionnels un enseignement général de qualité : en effet, le travail sur projet et les modules sont désormais intégrés dans l’horaire disciplinaire plancher, et cela provoque une forte diminution du temps indispensable à l’enseignement général.

Les professeurs de sciences vivent très mal cette baisse horaire et sont inquiets de ses répercussions inévitables sur la qualité de leur travail. Toutes les professions réclament davantage de réflexion et d’autonomie dans un environnement technique toujours plus complexe. L’enjeu de la formation initiale est aussi de permettre aux jeunes d’acquérir, après une entrée dans le monde du travail, le complément de formation nécessaire au moment utile. Nous ne répéterons jamais assez que l’apprentissage des sciences demande un temps suffisant de réflexion, de manipulation des notions, de discussion en commun, surtout pour ces élèves qui ont souvent mal profité de l’enseignement du collège et doivent trouver au lycée professionnel une seconde chance d’acquérir une formation.

 

L’orientation

Les questions d’orientation nous préoccupent dans deux directions : en amont et en aval du lycée professionnel.

En amont : nous sommes très inquiets de l’effondrement des orientations vers les lycées professionnels. Beaucoup d’établissements n’ont pas fait le plein et fonctionnent très au-dessous de leur capacité d’accueil cette année, et cela dans toute la France.

Nous avons vainement cherché des explications à ce phénomène, mais dans le même temps, les secondes d’enseignement général sont surchargées cette année, et les professeurs y sont inquiets des résultats catastrophiques de bon nombre de leurs élèves aux évaluations de début d’année. Nous pensons que l’orientation s’est mal passée cette année, et c’est d’abord au détriment des élèves : le principe d’une bonne orientation est de placer chaque élève dans l’environnement où il réussira. Un élève placé dans un système où il ne peut qu’échouer va perdre son temps, se décourager, s’aigrir, et perdre le goût d’apprendre. Pour certains élèves, l’accès à la seconde générale n’est pas un succès, c’est un pas vers l’exclusion.

Nous demandons que l’orientation soit pensée pour le bien de chaque élève et non pour améliorer tel ou tel chiffre statistique ! Pour que l’orientation vers l’enseignement professionnel soit davantage choisie par les élèves et les familles, il est nécessaire d’améliorer l’information dans les collèges sur ses réalisations et ses débouchés

L’enseignement professionnel ne doit plus apparaître comme un ghetto dans l’opinion publique.

En aval : beaucoup d’élèves des lycées professionnels souhaitent poursuivre leurs études après un bac pro. Or la marche est énorme entre le niveau du bac pro et le niveau des BTS, et c’est trop souvent un échec assuré. Il nous semble que ce passage du bac pro au BTS pourrait être aménagé pour ces élèves par exemple à l’aide de classes passerelles à définir. L’organisation actuelle est injuste pour eux, puisqu’elle leur donne le droit de poursuivre leurs études sans leur donner les moyens de réussir

 

La certification

Nous souhaiterions connaître vos intentions sur la certification, en ce qui concerne les disciplines d’enseignement général ; pour celles-ci, nous pensons que l’évaluation peut avoir la même forme que pour l’enseignement professionnel. Le contrôle en cours de formation peut s’adapter à ces disciplines, il est plus motivant et moins lourd que le seul examen final pratiqué aujourd’hui. Nous pensons aussi qu’il faut adapter la certification au public de l’enseignement professionnel en proposant aux élèves des étapes accessibles plutôt qu’un seul examen final. Enfin, nous nous interrogeons sur la place des disciplines générales, et en particulier des mathématiques dans la certification par validation des acquis professionnels.

 

La formation des maîtres

Il est indispensable que les formes d’évaluation et les contenus du concours de recrutement CA.P.L.P.2. se stabilisent.

La formation en IUFM posent d’énormes problèmes, la plupart des stagiaires ne connaissent pas le LP et n’y ont jamais mis les pieds avant leur admission au concours. La plupart sont immédiatement placés en responsabilité. Cela peut conduire à l’échec compte tenu de la bivalence et de la spécificité de ce type d’établissement souvent méconnues .

Nous souhaiterions vous rencontrer pour connaître vos intentions et préciser nos propositions et sollicitons une entrevue. Nous sommes prêts à participer à toute réflexion sur ces sujets.

Nous vous prions d’agréer, Monsieur le Ministre, l’expression de nos sentiments respectueux.

Le Président de l’A.P.M.E.P.

R. BELLOEIL

 

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