Bulletin Vert n°498
mars — avril 2012

Évariste Galois La fabrication d’une icône mathématique

par Caroline Ehrhardt

Éditions EHSS. 2011
304 pages 16 × 24, prix : 28,50 €, ISBN : 978-2-7132-2317-4

 

Outre une préface du sociologue Éric Brian, cet ouvrage comprend : une introduction, neuf chapitres, une conclusion, un glossaire des termes mathématiques, une copieuse bibliographie (27 pages), un index.

Il a pour thème principal mais non unique la mémoire, ou plutôt les mémoires collectives d’Évariste Galois qui se sont construites, transmises et transformées, de sa mort jusqu’à nos jours. Galois est présenté à l’intersection de trois espaces sociaux : à la fois étudiant, mathématicien et militant républicain. De plus, sa courte existence atypique en fait un héros romanesque et romantique.

  • L’Introduction relève le contraste entre la paucité (comprendre : rareté, faible abondance) des écrits de Galois et la prolifération des écrits sur lui ; on y trouve une biographie résumée en quatre pages qui évoque ses origines (famille de notables), ses études (intérêt exclusif pour les mathématiques), ses échecs à Polytechnique, le refus de ses mémoires par l’Académie, son entrée à l’École préparatoire (nom de l’École Normale Supérieure à l’époque), son séjour en prison, sa mort en duel à 21 ans.

Les six premiers chapitres dessinent des portraits sous plusieurs angles de ce personnage hors du commun, et le situent dans son contexte historique :

  • Le chapitre 1 : L’analyse de l’analyse
    donne un aperçu de ses travaux mathématiques, marqués par la concision, l’abstraction, l’évitement des calculs, la créativité, mais néanmoins ancrés dans le passé, portés par une connaissance approfondie des acquis antérieurs. Galois y apparaît conscient de sa valeur et assoiffé de reconnaissance.
  • Le chapitre 2 : La théorie des équations,
    une tradition savante au début du XIXe siècle développe l’état des recherches en algèbre avant Galois : travaux de Cauchy, Legendre, Lagrange, Gauss, Abel, Lacroix, …
  • Le chapitre 3 : Galois lycéen : la fureur des mathématiques
    nous apporte de précieux renseignements sur le système éducatif, et en particulier l’enseignement des sciences, dans les années 1800 — 1830. Des copies de Galois sont reproduites.
  • Les chapitres 4 : Les mathématiques transcendantes :de l’enseignement supérieur aux pratiques savantes , et 5 : Devenir mathématicien en 1830
    expliquent comment l’échec à Polytechnique est pour Galois un handicap institutionnel et social ; sa démarche, synthétique plutôt qu’analytique, préférant les démonstrations existentielles au constructivisme, est hétérodoxe ; il a de vastes savoirs, mais trop peu de savœoir-faire standardisés pour être admis dans le milieu mathématicien. Il est néanmoins pris au sérieux : publication de quelques articles, contacts avec Cauchy, Poisson, avis positif de Sophie Germain, …
  • Le chapitre 6 : Galois républicain
    entre histoire et mémoire est consacré à l’engagement politique du personnage, pas toujours facile à distinguer de sa propension à la rébellion et l’insolence ; il publie des textes virulents contre le système scolaire ; un geste provocant le conduit en prison, séjour qu’il occupe à poursuivre ses recherches mathématiques. Après sa mort il fera figure de martyr visionnaire.
  • Les chapitres 7 à 9
    s’étendent sur les différentes mémoires de Galois qui se sont succédées depuis lors : d’abord Une mémoire de mathématiciens, activée par la publication de ses œuvres en 1846 par Liouville, maintenue dans la durée par les interprétations, prolongements et extensions de nombreux chercheurs : Lejeune-Dirichlet, Dedekind, Jordan, Cayley, … qui aboutissent à travers les manuels d’enseignement à une certaine homogénéisation de la théorie de Galois ; ensuite Trois remaniements mémoriels inscrits dans une autre célébration  : à la fin du XIXe siècle Galois est reconnu pour sa théorie des équations, mais pas encore comme fondateur de la théorie des groupes, jusqu’à un discours de Lie et la réédition de ses œuvres commentées par Picard ; tandis que paraît une biographie qui insiste plus sur son engagement politique que sur ses travaux mathématiques. Enfin est relatée la marche Vers une mémoire sociale de Galois, soit sa reconnaissance comme figure historique, comme fondateur en mathématiques, comme philosophe des mathématiques, associé à des valeurs civiques, sociales et politiques, et aussi sujet de romans, films, pièces de théâtre, bandes dessinées.

Cette œuvre magistrale et passionnante, de lecture aisée malgré son érudition, doit trouver une place de choix dans la bibliothèque de quiconque s’intéresse peu ou prou à l’histoire des mathématiques.

 

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