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Le problème de Tammes

1. Origine

1.1. Un problème de botanique

Le botaniste hollandais Tammes découvrit, en
étudiant les grains de pollen, que ces grains [1], approximativement sphériques, portent des orifices
dont la répartition présente une certaine régularité, en
ce sens qu’ils semblent aussi éloignés que possible
les uns des autres.

Dans l’article, daté de 1930, où il rendait compte
de cette trouvaille, il s’interrogeait sur ce qui fut très
vite appelé le « problème de Tammes » :
Comment répartir n points sur une sphère de sorte que la plus petite
de leurs distances mutuelles soit aussi élevée que possible ?

1.2. Une fausse évidence

Un premier réflexe est de penser qu’il suffit de mettre les points aux sommets d’un
polyèdre régulier inscrit dans la sphère, c’est-à-dire un tétraèdre pour n = 4, un octaèdre
pour n = 6, un cube pour n = 8, un icosaèdre pour n = 12 et un dodécaèdre pour
n = 20.
Cette idée se heurte à deux objections majeures :
• Puisqu’il n’y a pas d’autres polyèdres réguliers que ces cinq-là, que se passe-t-il pour
les autres valeurs de n ?
• Est-on vraiment si sûr que, même dans ces cinq cas, le polyèdre régulier inscrit
fournit la solution ?

1.3. Un problème largement ouvert

De nombreux mathématiciens se sont depuis attaqués au problème, qui n’est
entièrement résolu que pour n ≤ 12 et pour n = 24. Ces résultats sont déjà anciens et
datent pour la plupart des années cinquante.

Le thème connaît depuis vingt ans un considérable renouveau d’intérêt ; il a
notamment fait l’objet de nombreux travaux portant sur la recherche de solutions
approchées.

1.4. Et pourtant c’est très simple … si on se limite aux toutes
premières valeurs de n.

Nous donnons ici les solutions pour les valeurs 2, 3, 4, 5 et 6. Et nous
montrerons que, dans le cas n = 8, le cube inscrit dans la sphère ne fournit pas la
solution.

Les démonstrations sont strictement élémentaires et à la portée
d’une classe de terminale S. Les cas n = 3, n = 4, n = 5 ou 6, n = 8
sont indépendants les uns des autres ; chacun d’eux peut être étudié
isolément.

1.5. Remarque

Observons que, si le segment joignant deux points M et N d’une sphère de centre
O et de rayon R est vu du centre sous un angle $\alpha$, la distance MN vaut 2R $\sin \frac{\alpha}{2}$ et
la « distance sphérique » des deux points, longueur de l’arc de grand cercle les
joignant, est R $\alpha$. Les deux grandeurs R$\alpha$ et 2R$\alpha$ variant dans le même sens,
le problème traité dans cet article est aussi de maximiser la plus petite des distances
sphériques
mutuelles de n points d’une sphère (c’est même son interprétation la plus
naturelle).

2. Cas n = 2 et n = 3

2.1. n = 2

La solution est immédiate : deux points diamétralement opposés.

2.2. n = 3

Prenons maintenant trois points A, B, C sur une
sphère S de rayon R. Soit K le cercle intersection de S
et du plan ABC. Nous sommes ramenés au problème
intermédiaire suivant : quelle position doivent avoir trois
points A, B, C d’un cercle pour que la plus petite des
distances AB, BC, CA soit aussi élevée que possible ?

La longueur d’une corde d’un cercle est d’autant plus
grande que l’angle sous lequel elle est vue du centre est
élevé. Nous voulons donc que le plus petit des trois
angles $\widehat{AOB}$, $\widehat{BOC}$ et $\widehat{COA}$ aussi grand que possible. Si les points A, B, C sont sur un même demi-cercle, le plus petit des trois
angles est au plus égal à $\frac{\pi}{2}$. Si A, B, C ne sont pas sur un même demi-cercle, la
somme des trois angles est 2 ${\pi}$ et le plus petit des trois angles est au plus égal à $\frac{2 \pi}{3}$.

Finalement, les solutions pour n = 3 sont les triangles équilatéraux inscrits dans
un grand cercle de la sphère
, l’écart maximum cherché étant R$\sqrt{3}$.

 

3. Cas n = 4

3.1. Un calcul préalable

Soit quatre points A, B, C, D sur une sphère S de centre O et de rayon R. Étudions
d’abord la somme $\sigma$ des carrés des six distances mutuelles de ces points :

$$\sigma = \overrightarrow{AB}^{2}+\overrightarrow{AC}^{2}+\overrightarrow{AD}^{2}+\overrightarrow{BC}^{2}+\overrightarrow{BD}^{2}+\overrightarrow{CD}^{2}$$

Introduisons le point O :

$$\sigma = (\overrightarrow{OB} - \overrightarrow{OA})^{2}+(\overrightarrow{OC} - \overrightarrow{OA})^{2}+(\overrightarrow{OD} - \overrightarrow{OA})^{2}+(\overrightarrow{OC} - \overrightarrow{OB})^{2}+(\overrightarrow{OD} - \overrightarrow{OB})^{2}+(\overrightarrow{OD} - \overrightarrow{OC})^{2}$$

En développant, il vient

$$\sigma = 12 R^{2} - 2 ( \overrightarrow{OA}. \overrightarrow{OB} +\overrightarrow{OA}. \overrightarrow{OC}+\overrightarrow{OA}. \overrightarrow{OD}+\overrightarrow{OB}. \overrightarrow{OC}+\overrightarrow{OB}. \overrightarrow{OD}+\overrightarrow{OC}. \overrightarrow{OD})$$

Ces doubles produits rappellent irrésistiblement le développement du carré d’une
somme. Calculons donc $\tau = (\overrightarrow{OA}+\overrightarrow{OB}+\overrightarrow{OC} +\overrightarrow{OD}) ^2$ soit

$$\tau = 4 R^2 + 2 (\overrightarrow{OA}. \overrightarrow{OB} +\overrightarrow{OA}. \overrightarrow{OC}+\overrightarrow{OA}. \overrightarrow{OD}+\overrightarrow{OB}. \overrightarrow{OC}+\overrightarrow{OB}. \overrightarrow{OD}+\overrightarrow{OC}. \overrightarrow{OD})$$

Nous obtenons aussitôt la relation $\sigma +\tau = 16 R^2$.

Si l’on appelle G l’isobarycentre des quatre points, on a

$$\overrightarrow{OG}=\frac{1}{4} (\overrightarrow{OA}+\overrightarrow{OB}+\overrightarrow{OC}+\overrightarrow{OD}),$$

d’où $\tau = 16 \overrightarrow{OG}^{2}$ et finalement

$$\sigma = 16 (R^2 - \overrightarrow{OG}^2). $$

3.2. Les solutions

Soit δ la plus petite des six distances des quatre points deux à deux ; il résulte de
ce qui précède que l’on a :

$$6 \delta ^2 < 16 R^2$$

sauf si les six distances sont égales entre elles, avec G = O, ce qui correspond aux
tétraèdres réguliers inscrits dans S.

En conclusion, les solutions pour n = 4 sont les tétraèdres réguliers inscrits dans
la sphère
, l’écart entre leurs sommets étant $\frac{2R\sqrt2}{\sqrt3}$

4. Cas n = 5 et n = 6

4.1. Les sommets d’un octaèdre

Observons d’abord que, si on coupe (voir figure 2) une
sphère S par les trois axes d’un repère orthonormal d’origine
le centre O de S, on obtient les six sommets d’un octaèdre
régulier Ω inscrit dans S. La plus petite des distances
mutuelles de ces six points est $R \sqrt2 $, où R est le rayon deS. On peut donc trouver sur S six points (et a fortiori cinq)
dont les distances mutuelles sont au moins égales à $R \sqrt2$ .

Nous allons montrer qu’on ne peut pas trouver mieux.

Dire que la distance de deux points A et B de S est au moins égale à $R \sqrt2$ revient
à dire que $\widehat{AOB}\geq \frac{\pi}{2}$ . Nous cherchons donc tous les systèmes de cinq points A, B,
C, D, E de S tels que les segments qui les joignent deux à deux soient tous vus
de O sous un angle obtus ou droit.

4.2. Le théorème (T)

L’étude reposera sur le théorème [2]
que voici :

(T) : Soit dans l’espace un angle $\widehat{MOP}$ obtus ou droit.
Si les points M et P sont d’un même côté (au sens large)
d’un plan Π passant par O, la projection orthogonale sur
Π de cet angle est un angle droit ou obtus ; de plus, si
cette projection est un angle droit, l’angle $\widehat{MOP}$ est
droit et un des points M ou P est dans Π.

Le raisonnement s’appuie sur une propriété bien connue : le produit scalaire de
deux vecteurs est négatif, positif ou nul selon que leur angle est obtus, aigu ou droit.

Appelons m et p les projections de M et P sur Π, et $\vec u$ le vecteur unitaire
orthogonal à Π situé du même côté que M et P. Nous avons $\overrightarrow{OM} = \overrightarrow{Om} + {x} \vec u $ et $\overrightarrow{OP} = \overrightarrow{Op} + {y} \vec u $, avec x ≥ 0 et y ≥ 0. On en tire $ \overrightarrow{OM}.\overrightarrow{OP}= \overrightarrow{Om}.\overrightarrow{Op} + {x y} $ d’où

$$ \overrightarrow{Om}.\overrightarrow{Op} \leq \overrightarrow{OM}.\overrightarrow{OP} \leq 0 ~; ~; ~; ~; ~; ~;(I)$$


Cela prouve déjà que $\widehat{mop}$ est obtus ou droit. De plus, si $\widehat{mop}$ est droit, la double inégalité (I) montre que $\widehat{MOP}$ l’est aussi. Enfin, de $ \overrightarrow{OM}.\overrightarrow{OP}= \overrightarrow{Om}.\overrightarrow{Op} + {x y} $, on tire
alors xy = 0, qui prouve que M ou P est dans le plan.

4.3. Le théorème (U)

Du théorème (T) résulte aisément le théorème suivant :

(U) Si cinq points d’une sphère sont tels que les segments qui les joignent deux à
deux soient tous vus du centre sous un angle obtus ou droit, alors deux d’entre eux
sont diamétralement opposés.

Soient donc cinq points A, B, C, D, E de S tels que les segments qui les joignent
deux à deux soient tous vus de O sous un angle obtus ou droit. Ces points étant en
nombre impair, il y en a au moins un, mettons E, qui n’est diamétralement opposé
à aucun des autres.

Soit Π le plan perpendiculaire en O à $\overrightarrow{OE}$ ; puisque les angles $\widehat {AOE} , \widehat {BOE} , \widehat {COE}, \widehat {DOE}$ sont obtus ou droits, les points A, B, C, D sont par rapport à Π dans le demi-espace fermé qui ne contient pas E.


Appelons a, b, c, d les projections orthogonales sur
Π de A, B, C, D. Réarrangeons les noms des points pour
qu’en tournant dans Π autour de O on rencontre
successivement les demi-droites d’origine O portant a, b,
c, d
. On a évidemment $\widehat {aOb} + \widehat {bOc} +\widehat {cOd} + \widehat {dOa}= 2 \pi$.
D’après le théorème (T), les angles $\widehat {aOb}$, $\widehat {bOc}$, $\widehat {cOd}$, $\widehat {dOa}$ sont obtus ou droits. Et comme leur somme est $2\pi$, ils sont droits tous les quatre. Mais, d’après la
seconde moitié du théorème (T), les angles $\widehat {AOB} , \widehat {BOC} , \widehat {COD}, \widehat {DOA}$ sont droits
eux aussi.
Ainsi chacun des deux vecteurs $\overrightarrow{OA}$ et $\overrightarrow{OC}$ est orthogonal à $\overrightarrow{OB}$ et $\overrightarrow{OD}$. Si ces deux derniers ne sont pas colinéaires, il en résulte que $\overrightarrow{OA}$ et $\overrightarrow{OC}$ le sont.
Finalement : ou B et D sont diamétralement opposés sur S, ou A et C le sont, ce qui
termine la démonstration du théorème (U).

4.4. Résultats du cas n = 5

Étant donnés cinq points A, B, C, D, E de S tels que les segments qui les joignent
deux à deux soient tous vus de O sous un angle obtus ou droit, nous savons que deux
d’entre eux, mettons Aet C, sont diamétralement opposés. Prenons un des trois autres
points, par exemple B.

On a $\overrightarrow{OA}. \overrightarrow{OB} \leq 0 $ mais aussi $\overrightarrow{OC}. \overrightarrow{OB} \leq 0 $ c’est-à-dire $\left(- \overrightarrow{OA} \right ). \overrightarrow{OB} \leq 0 $ et donc
au total $\overrightarrow{OA}. \overrightarrow{OB} = 0 $. Ainsi les trois points B, D, E sont dans le plan perpendiculaire
en O à la droite AC.

Inversement, si on prend deux points A et C diamétralement opposés et trois
autres points B, D, E de S situés sur le grand cercle de pôles A et C, il suffit
d’imposer aux trois angles $\widehat {BOD} $ , $\widehat {DOE} $, $\widehat {EOB} $ d’être obtus ou droits (ce qui ne pose
aucun problème puisque leur somme est 2$\pi$) pour avoir cinq points dont les distances
mutuelles sont au moins égales à $R\sqrt{2}$.

4.5. Résultats du cas n = 6

Soient six points A, B, C, D, E, F de S tels que les segments qui les joignent
deux à deux soient tous vus de O sous un angle obtus ou droit (ou, ce qui revient au
même, tels que leurs distances mutuelles soient au moins égales à $R\sqrt2$). Il résulte
du théorème (U) que deux des points, par exemple A et C, sont diamétralement
opposés.

Le raisonnement fait au § 4.4. s’applique encore : les quatre points B, D, E, F
sont dans le plan perpendiculaire en O à la droite AC, donc sur le grand cercle de pôles
A et C. En supposant que B, D, E, F sont dans cet ordre sur ce cercle, les angles $\widehat {BOD} $ , $\widehat {DOE} $, $\widehat {EOF} $, $\widehat {FOB} $ qui sont obtus ou droits et ont pour somme $2 \pi $, sont
tous droits et BDEF est un carré. Les six points forment un octaèdre régulier inscrit
dans S.

4.6. Récapitulation

Ainsi « l’espacement maximum possible » de cinq ou six points sur une sphère
de rayon R est $R\sqrt{2}$. Il est atteint seulement par les sommets d’un octaèdre inscrit
dans le cas de six points, mais par une plus grande variété de configurations dans le
cas de cinq points.

5. Cas n = 8

Nous nous contenterons de montrer que prendre huit points de S aux sommets
d’un cube inscrit dans S n’est pas optimal. Pour cela, nous exhiberons un autre
polyèdre inscrit dans S et tel que la plus petite des distances mutuelles de ses sommets
soit supérieure au côté du cube inscrit.

5.1. Étude du cube inscrit

Soit un cube K de côté $\ell$, O son centre, A un sommet, H le
centre de la face ABCD, R le rayon de la sphère circonscrite S.
Le triangle OHA est rectangle en H, donc

$$ R^2 = OA^2= OH^2+ HA^2 = \left( \frac\ell{2}\right)^2 + \left( \frac{\ell\sqrt 2}{2}\right) ^2 = \frac{3 \ell ^2}{4}$$


La distance minimale de deux sommets du cube inscrit dans S, qui est $\ell$, vaut donc $\frac{2 R}{\sqrt3}$. Il nous reste à exhiber sur S un système de huit points qui fasse mieux.

5.2. Recherche empirique d’une meilleure configuration

Pour améliorer le rapport $\ell$/R, nous allons déformer le
cube.

Imaginons le dispositif suivant :
• les deux faces ABCD et A′B′C′D′ sont deux plaques carrées
rigides horizontales de côté $\ell$, la plaque ABCD est fixe et la
plaque A′B′C′D′ mobile ;
• H désignant le centre de la plaque fixe, le centre H′ de
A′B′C′D′ peut glisser le long de la verticale issue de H ; d’autre part la plaque A′B′C′D′ peut tourner autour de cette verticale ;
• les arêtes AA′, BB′, CC′, DD′ sont des tiges rigides de longueur $\ell$ articulées en leurs
extrémités aux deux plaques.

Si, à partir de la position donnant un cube, l’on fait tourner la plaque A′B′C′D′
autour de leur axe commun d’un angle $\varphi $ pas trop élevé, la plus petite distance des
huit points deux à deux reste le côté $\ell$ du cube. Il est intuitif que la plaque supérieure
s’abaisse quand $\varphi $ augmente. Or le milieu O de HH′ est équidistant des huit points ;
c’est donc le centre de la sphère circonscrite. Si h est la distance HH′, on voit aussitôt
que le rayon R de la sphère vérifie $R^2 = \frac {\ell ^2} {2} + \frac{h^2}{4}$

Lorsque $\varphi $ croît, h diminue et donc aussi R, ce qui augmente le rapport $\ell$/R. Mais
on ne peut pas trop augmenter $\varphi $ , car lorsque $\varphi $ passe par la valeur $\frac{\pi}{4}$, A′ franchit le
plan médiateur de AB, donc la distance A′B devient inférieure à A′A, c’est-à-dire à $\ell$.
Le cas $\varphi = \frac{\pi}{4}$, semble donc a priori le meilleur possible.

Il nous reste à l’étudier de manière formellement correcte.

5.3. Un joli polyèdre

On donne dans un plan horizontal un carré ABCD
de côté l et de centre H ; on prend un repère orthonormé
Hxyz tel que Hx soit la médiatrice de AB, Hy celle de
BC (B étant dans l’angle $\widehat{xOy}$ ), Hz dirigé vers le haut
(la figure 7 représente la projection orthogonale de
l’ensemble sur le plan Hxy).

On fait tourner le carré ABCD de + $\frac{\pi}{4}$ autour de Hz, puis on effectue une
translation parallèlement à Hz, de mesure positive h. On obtient ainsi un carré
A′B′C′D′, de centre H′. On joint enfin les sommets du premier aux deux sommets les
plus proches sur le second : on joint A à D′ et A′, B à A′ et B′, …, ce qui détermine
huit triangles isocèles délimitant avec les deux carrés un polyèdre P. Il est immédiat
que le milieu O de [HH′] est équidistant des huit points sommets des carrés. O est
donc le centre de la sphère circonscrite S.

5.4. Choix de h

Nous choisissons h de telle sorte que les huit
triangles isocèles formant le pourtour latéral de P
soient équilatéraux. Il faut et il suffit pour cela,
compte tenu des symétries de la figure, que A′B = $\ell$.
Or les coordonnées de ces points sont A’ $\left(\frac \ell {\sqrt 2},0 ,{h}\right)$ et
B$\left(\frac\ell {2}, \frac\ell {2}, 0 \right)$. On a

$$ A’B^2 = {\ell}^2 \left( \frac{\sqrt{2} - 1}{2} \right)^2 + \frac{\ell ^2}{4} + {h}^2 $$


L’équation $A’B^2 = {\ell}^2$ s’écrit après réduction

$${h^2} = {\ell}^2 \frac{3 - \left(\sqrt{2} - 1 \right)^2}{4} = \frac {\ell^2}{\sqrt 2}$$


soit

$$ {h} = \frac \ell{\sqrt[4]{2}}$$

Désormais, nous supposerons cette égalité réalisée. Les faces de P sont donc
toutes des polygones réguliers : deux carrés et huit triangles équilatéraux, ce qui fait
que les arêtes sont toutes de longueur $\ell$. Montrons que la distance entre deux sommets
qui ne sont pas aux extrémités de la même arête est strictement supérieure à $\ell$. Il
suffit, compte des symétries de P, de faire la vérification lorsqu’un des deux points est
A. Les distances à examiner sont AC, AB′, AC′ ; le premier segment a pour longueur $\ell \sqrt 2$
et la figure 7 montre que les projections orthogonales des deux autres sur le
plan Hxy ont déjà une longueur supérieure à $\ell$.

5.5. Relation entre $\ell$ et R

Reprenons la figure 8. Si R désigne le rayon de la sphère circonscrite aux huit
points, on a R = OA et, par le théorème de Pythagore

$$ R^2 = OH^2+ HA^2 =\frac{h^2}{4}+ \frac{\ell^2^}{2}= \ell^2 \left( \frac{1}{4\sqrt2} + \frac{1}{2} \right)=\ell^2 \left( \frac{1+2\sqrt2}{4\sqrt2}\right)$$

ce qui en sens inverse donne

$$\ell = \frac{2}{\sqrt7} \sqrt{4 - \sqrt2} R $$

Ainsi, dans une sphère S de rayon R, on peut inscrire un cube d’arête $\frac{2 R}{\sqrt3}$ et le
polyèdre P d’arête $ \frac{2}{\sqrt7} \sqrt{4 - \sqrt2} R $.Mais $\frac{2}{\sqrt3}\approx 1,1547 $ et $ \frac{2}{\sqrt7} \sqrt{4 - \sqrt2} R \approx 1,2156 $

Les huit sommets de P sont donc plus espacés que les huit sommets
d’un cube inscrit dans la même sphère.

N.B. : La disposition que nous venons d’étudier pour huit points est en fait la
meilleure possible, mais la démonstration est une autre paire de manches.

6. Conclusion

Le problème de Tammes illustre un phénomène classique aussi bien en géométrie
qu’en arithmétique : une question peut être formulée en une ou deux phrases
intelligibles pour un non-mathématicien et sa résolution rester en suspens durant des
décennies, voire des siècles.

On peut y voir aussi un exemple de l’interaction entre les mathématiques et les
sciences expérimentales. Issue de la biologie, cette idée de répartir au mieux des points
sur une sphère a des applications dans nombre de sciences et de techniques (selon [1],
cela va des réacteurs nucléaires aux balles de golf).

Bibliographie

[1] BERGER Géométrie vivante, Cassini 2009, chapitre III, « La sphère pour elle-
même », p. 167-212.

Donne l’état actuel de la question ; voir sur l’ensemble du livre la recension faite par
P-L Hennequin dans ce même BV).

[2] http://www.iri.upc.edu/people/ros/StructuralTopology/ST9/st9-07-a4-ocr.pdf
TARNAI « Spherical Circle-Packing in Nature, Practice and Theory ».
Article bilingue anglais-français, très intéressantes illustrations (dont une jolie
référence à Jérôme Bosch), abondante bibliographie.

<redacteur|auteur=511>

Notes

[1La photo ci-contre, que l’on trouvera avec d’autres dans [2], provient du Laboratoire de
géologie du Quaternaire, du C.N.R.S.

[2Ce théorème a une forte parenté avec le « théorème de la projection orthogonale d’un
angle droit », qui fut un thème majeur des classes de Première jusque dans les années
soixante : un angle droit se projette orthogonalement sur un plan suivant un angle droit si
et seulement si un de ses côtés est parallèle au plan.

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