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Regards croisés : un échange entre étudiants et collégiens.

Anne Ruhlmann [1] & Rozenn Texier-Picard [2]

En mars 2007, dans le cadre de l’opération À la découverte de la recherche, lancée
conjointement par le rectorat de Rennes, l’université de Rennes 1, l’INRA et le
CNRS, je suis entrée en contact avec Rozenn Texier-Picard pour qu’elle intervienne
dans ma classe de Sixième avec trois doctorants.

Le thème retenu était le problème isopérimétrique, qui peut se formuler ainsi :
parmi toutes les formes de périmètre donné, quelle est celle qui délimite un domaine
d’aire maximale ?

Les échanges au cours de l’opération précédente ayant été très fructueux, c’est tout
naturellement que, dès septembre 2007, je reprenais contact avec Rozenn Texier-
Picard pour lui demander si elle était partante pour reconduire l’opération de l’année
passée tout en lui donnant plus d’ampleur avec, par exemple, une visite de leur école
par les collégiens. Rozenn Texier-Picard répondit très favorablement et proposa même
de participer au projet académique mis en place par le rectorat de Rennes, Une école-une
classe
 : l’objectif est de mettre en relation un établissement secondaire, une école
supérieure et une entreprise, avec trois temps forts : une visite de la classe de collège
par des étudiants, puis la visite de l’école supérieure et de l’entreprise par les
collégiens.

Quels objectifs ?

Au collège

  • Montrer aux collégiens que les mathématiques sont une science vivante, en
    interaction avec le monde d’aujourd’hui.
  • Leur donner l’occasion d’être acteurs et non auditeurs passifs pour les aider à
    construire un savoir plus « durable ».
  • Leur donner l’envie d’en savoir plus dans le domaine des sciences.
  • Leur prouver que les études scientifiques ne sont pas réservées aux garçons.

À l’ENS

  • Apprendre aux étudiants à s’adresser à un jeune public, leur donner le goût de
    la diffusion des savoirs.
  • Montrer aux étudiants, qui souvent manquent de repères sur l’histoire des
    sciences, comment, à travers ce très vieux problème mathématique, progresse
    la recherche, sur des périodes qui peuvent être très longues.• Donner l’occasion à tous les étudiants qui se destinent à l’enseignement de
    mieux connaître les réalités de l’enseignement secondaire aujourd’hui.
  • Faire appréhender à tous les étudiants qui préparent une carrière universitaire,
    que connaître l’enseignement secondaire ne peut que favoriser et faciliter le
    rapprochement du lycée et du supérieur.
  • Initier les étudiants au monde de la recherche : dans les établissements
    d’enseignement supérieur, chercheurs et étudiants se côtoient sans que les
    étudiants de licence aient réellement l’occasion de découvrir le monde de la
    recherche. Ce projet est donc aussi une opportunité pour eux de se pencher sur
    un des thèmes de recherche présents dans l’établissement.

Comment a-t-on lancé le projet ?

Au collège
À plusieurs reprises, j’ai proposé à mes élèves des exercices [3]. utilisant des
données réelles fournies par l’entreprise ACR [4] pour leur montrer l’utilisation
concrète des mathématiques : création de graphiques illustrant les différentes causes de
coupure de courant dues aux arbres ces trois dernières années dans les départements
d’Ille-et-Vilaine et Morbihan ; lecture et comparaison de deux courbes de charge du
poste EDF le plus proche du collège d’un dimanche et d’un lundi.
Il arrive souvent que des élèves en difficulté devant un exercice essaient de s’en
sortir par une pirouette en posant l’éternelle question Mais à quoi servent les maths ?.
C’est pour cela que j’ai demandé à chaque élève de réaliser un court diaporama [5] sur
le thème : Les mathématiques dans la vie courante en évitant la réponse classique « à
faire ses courses
 ». Je les ai incités à passer en revue tous les métiers qu’ils
connaissaient avant de choisir leur sujet.

À l’ENS
Une courte présentation du projet a été faite par Rozenn Texier-Picard devant tous
les étudiants de Première année à la fin d’un cours, et un appel à volontaires a été
lancé. Les retours ont été enthousiastes, et des entretiens avec les étudiants intéressés
ont permis de préparer la première rencontre avec les collégiens, destinée à leur faire
découvrir le monde de la recherche et les études scientifiques. Les étudiants ont
commencé par constituer une équipe et réaliser une ébauche de ce que pourrait être
cette première rencontre.

Que s’est-il réellement passé au collège ?

Sondage sur la Recherche (novembre-décembre)
Les deux enseignantes et les étudiants ont réalisé ensemble un sondage [6] en ligne sur
le monde de la recherche à destination des collégiens. Les élèves de la classe ont été
invités à répondre à ce sondage avant la visite des étudiants.

Quatre étudiants au collège début décembre
Leur intervention, d’une durée d’1 h 40, s’est divisée en quatre grandes parties :
 parler de la vie étudiante et des études scientifiques [7]
 essayer de donner aux élèves une idée de ce qu’est réellement la recherche [8] en
s’appuyant sur le sondage,
 réaliser un sketch [9] pour présenter le problème isopérimétrique,
 proposer un quiz [10] aux élèves répartis en trois équipes sur tout ce qu’ils auront
abordé pendant la rencontre.

Les étudiants présentent leur sketch aux élèves de Sixième

Préparation de la journée à l’ENS
Les collégiens manipulent [11] ficelle et ciseaux pour s’approprier les deux notions
qu’ils confondent souvent, à savoir le périmètre et l’aire, et ainsi pouvoir être plus
réceptifs lors des ateliers sur le problème isopérimétrique que leur ont préparé les
étudiants.

Les collégiens à l’ENS en mars
Le matin, les collégiens découvrent pour la première fois ce qu’est un amphithéâtre,
un bureau de recherche, une salle de classe en études supérieures et des équipements
pour les travaux pratiques en Physique. Certains d’entre eux prennent des photos sur
place pour réaliser par la suite de courts diaporamas [12].
Un chercheur [13] en mathématiques présente ensuite aux élèves quelques thèmes de
recherche actuelle en optimisation mathématique, en particulier en optimisation de
formes, une thématique développée dans le laboratoire.
Le déjeuner se déroule au restaurant [14] universitaire avec les grands !
L’après-midi, la classe est divisée en trois groupes pour pouvoir participer dans de
meilleures conditions à des ateliers sur le problème isopérimétrique avec pour ligne
directrice le problème de la reine Didon. Un goûter permettant l’échange entre
étudiants, élèves et enseignants clôture la journée.

atelier Les bulles

atelier Les formes

atelier La ficelle [15]

Visite de l’ACR par les collégiens en avril

Avant cette visite, les collégiens se sont familiarisés avec le vocabulaire spécifique [16]
de cette entreprise à l’aide du matériel pédagogique fourni par EDF et d’affichettes
téléchargeables sur le site RTE.
Il s’agit lors de cette visite de montrer aux collégiens comment quelques personnes
assistées d’une centaine d’ordinateurs peuvent surveiller le réseau électrique de deux
départements : localiser le plus vite possible une panne et réalimenter un maximum
de clients en un minimum de temps. Deux diaporamas sur la recherche de défauts leur
sont présentés : un dépouillé en début de visite et un autre en fin de visite. Ils
assistent aussi à une simulation de panne.

Bilan

Principales découvertes
Au collège : J’ai été très agréablement surprise de découvrir l’implication et le
sérieux des quatre étudiants qui sont intervenus dans ma classe. Contrairement à
l’année passée, ils n’étaient pas accompagnés de leur professeur et ils ont dû par
conséquent s’investir beaucoup plus.

À l’ENS côté étudiants : Les étudiants ont été agréablement surpris de la vivacité
d’esprit dont ont fait preuve les élèves. « Nos années de collège étant lointaines, nous
ne savions pas trop à quel niveau placer notre intervention. Ce projet nous a aussi
permis de prendre conscience de l’implication nécessaire pour mener à bien une telle
initiative. Nous avons découvert également à quel point il était complexe
d’enseigner : chaque mot prononcé doit être bien choisi, la professeure de
mathématiques nous l’a bien fait comprendre
 ».

Obstacles rencontrés à l‘ENS

Côté enseignants : une difficulté a été de trouver des dates pour organiser la visite
au collège et l’accueil des étudiants, l’emploi du temps étant déjà chargé. Finalement,
la visite au collège s’est faite pendant la semaine de révisions avant les examens du
premier semestre. Pour l’accueil des collégiens, les étudiants ont dû en revanche rater
une journée de cours.

Côté étudiants : Plusieurs difficultés se sont présentées. Tout d’abord, comment
organiser le temps de la rencontre pour garder l’attention des élèves pendant 1 h 40
lors de notre visite au collège de Liffré car nous avions beaucoup de choses à dire.
Notre premier travail a donc été de faire le tri : dire des choses intéressantes,
compréhensibles et interactives, le tout dans un rythme qui convienne aux élèves. Il
était également nécessaire que les élèves ne soient pas trop impressionnés et
n’hésitent pas à participer : nous avons décidé dans ce but de nous mettre en scène de
façon amusante lors d’un sketch. De plus, il nous fallait exploiter le fait qu’il y ait
deux rencontres : la visite à Liffré devait donc se préparer en vue des activités
souhaitées lors de la visite des élèves à l’ENS.

Évolution du projet en cours de route

Au collège  : L’enthousiasme des élèves lors de la venue des étudiants m’a poussée
à aller encore plus loin dans le projet. C’est ainsi que je leur ai proposé de réaliser
ensemble un quiz sur le thème de la Recherche, publié sur le Web sous forme de jeu
interactif [17]

À l’ENS  : Rozenn Texier-Picard a trouvé que ses étudiants se sont très rapidement
approprié le projet et ont fait preuve d’un grand sens de l’initiative, allant bien au-delà
de ce qui était proposé au départ (sketch, quizz, …). Quant à eux, l’intérêt et la
vivacité d’esprit dont les élèves ont fait preuve lors de leur visite les ont incités à
organiser des ateliers dont les élèves seraient les premiers acteurs lors de leur venue
dans leur école.

Transférabilité

Toutes les activités peuvent être transposables. La mise en place dépend de la
motivation de chaque participant. La rédaction et la mise en ligne de l’ensemble des
documents [18]
utilisés doit permettre une appropriation rapide par d’autres enseignants

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