Socle de connaissances

L’APMEP a tenu à associer son nom et sa signature au texte suivant proposé par la SMF et retravaillé par le bureau de l’APMEP.
Nous tenons notamment à réaffirmer l’importance des compétences transversales. Pour l’APMEP, l’enseignement des mathématiques au collège ne se réduit pas à l’enseignement du socle. Le traitement des programmes et la préparation à l’accès au lycée continuent d’être un des objectifs importants du collège. Le socle ne saurait être figé, mais doit évoluer en fonction des premières années d’expérimentation.

Michel FRECHET

"SOCLE COMMUN DES CONNAISSANCES ET COMPETENCES" ET OBJECTIFS GENERAUX DE L’ENSEIGNEMENT DES MATHEMATIQUES

Le « socle commun des connaissances et compétences » a été institué par la loi d’orientation pour l’école du 23 avril 2005. Selon l’article 9 de cette loi, le socle commun est « constitué d’un ensemble de connaissances et de compétences qu’il est indispensable de maîtriser pour accomplir avec succès sa scolarité, poursuivre sa formation, construire son avenir personnel et professionnel et réussir sa vie en société. » La définition des contenus du socle commun a été confiée au Haut Conseil de l’Education.
En tant que représentants de la communauté mathématique – enseignants des collèges, des lycées, de l’enseignement supérieur, chercheurs – nous nous réjouissons que les mathématiques se voient reconnues, par leur place dans le « socle commun », comme un des piliers de la formation des jeunes. A ce propos, il n’est pas inutile de rappeler que, dans les années 1997-2000, l’importance et l’intérêt des mathématiques avaient été violemment mis en cause, au plus haut niveau, par le ministre de l’Education Nationale lui-même. A notre connaissance, jamais une discipline d’enseignement, quelle qu’elle soit, n’avait été aussi brutalement et injustement dénigrée ; nous espérons sincèrement que cela ne se reproduira pas.
En lien avec la réflexion actuelle sur le « socle commun », nous souhaiterions tenter de préciser quels sont, à notre avis, les objectifs généraux de l’enseignement des mathématiques. Ils sont au nombre de trois et ne s’excluent pas mutuellement :

Objectif 1 : Donner à tous les jeunes, filles et garçons, une formation de base en mathématiques.
Il faut bien sûr leur apprendre à compter, mentalement et par écrit, leur enseigner des éléments de géométrie. Il faut aussi éveiller leur aptitude au raisonnement logique et leur curiosité intellectuelle, les initier à la résolution de problèmes simples. Il faut enfin les former à mettre en œuvre leurs connaissances dans les situations de la vie courante où une maîtrise élémentaire des nombres, des données statistiques et de l’espace est nécessaire. A travers ces différents aspects, les mathématiques sont une composante incontournable de la culture générale. Ce premier objectif s’intègre parfaitement au « socle commun » ; il relève essentiellement de la scolarité élémentaire et du collège.

Objectif 2 : Former les utilisateurs et utilisatrices de mathématiques – scientifiques, ingénieurs, techniciens, commerciaux, etc – en liaison avec les champs disciplinaires où elles s’appliquent : physique, chimie, technologie, informatique, économie, biologie, sciences humaines... Dans une société qui s’appuie de plus en plus sur la science et la technologie, où les besoins d’analyse prévisionnelle et statistique augmentent d’année en année, cet objectif ne saurait être sous-estimé. C’est ainsi que la nécessité de compétences mathématiques adaptées (en niveau et en contenu) se retrouve dans de nombreuses professions, y compris les ouvriers hautement qualifiés, les techniciens supérieurs et, bien sûr, les cadres de l’industrie, de l’administration et du commerce. Par exemple, le niveau de qualification des 25000 ingénieurs que nous formons annuellement est un garant de notre développement économique ; or la maîtrise des concepts scientifiques et techniques nécessaires au métier d’ingénieur exige aujourd’hui, plus que jamais, un bon niveau en mathématiques.

Objectif 3 : Former des spécialistes en mathématiques, hommes et femmes.
Présents dans tous les secteurs de l’industrie et des services, ils modélisent, optimisent et prévoient. Professeurs de mathématiques des lycées et collèges, ils dominent suffisamment leur discipline pour en assurer un enseignement rigoureux, vivant et évolutif, ouvert sur les applications. Dans les grands organismes de recherche, les universités et grandes écoles, les entreprises, ils développent des mathématiques nouvelles. Les avancées mathématiques sont plus que jamais une ressource stratégique, car de nombreux problèmes concrets de développement technologique ou économique nécessitent des outils mathématiques nouveaux et sophistiqués – y compris des outils hautement conceptuels et loin, en apparence, de la « pratique ». Tous les indicateurs placent l’école mathématique française en recherche très haut dans la hiérarchie mondiale (en deuxième position), mais cette situation pourrait se dégrader rapidement si la formation des nouvelles générations était compromise.

Au demeurant, ces trois objectifs, qui impliquent une articulation entre plusieurs niveaux, ne sont pas spécifiques à l’enseignement des mathématiques. Les objectifs généraux de l’enseignement du français, par exemple, pourraient sans doute se décliner de manière analogue.
La difficulté de l’exercice, dans le cas des mathématiques, provient du fait que la discipline a une très forte cohérence interne. C’est ainsi que le manque de « bases » ou les « lacunes », comme le disent les élèves eux-mêmes, obèrent fortement la poursuite d’études ultérieures incluant des mathématiques – ceci, nous semble-t-il, quel que soit le niveau. Certes, ce phénomène existe dans toutes les disciplines ; il nous semble cependant particulièrement important dans le cas des mathématiques, et entraîne parfois des phénomènes de rejet très violents.
Pour des raisons historiques, le troisième objectif a longtemps pris le pas sur les deux autres dans notre pays, ce qui a contribué à encourager certaines pratiques élitistes et à créer un taux d’échec important. Depuis une quarantaine d’années, de nouvelles exigences d’ordre économique et social ont conduit à des évolutions pour mieux prendre en compte chacun des trois objectifs ci-dessus. Tous les trois sont également importants. Leur coordination est la clé d’un développement harmonieux, mais elle est complexe à mettre en œuvre.
Ainsi, d’énormes efforts doivent être consacrés à assurer l’enseignement de qualité, exigeant et efficace, nécessaire à la mise en place du « socle commun » : la maîtrise des connaissances et compétences du socle posera de sérieux problèmes à certains élèves. Mais par ailleurs, le niveau des « principaux éléments de mathématiques » proposés par les services du Ministère de l’Education Nationale dans le cadre du socle ("Le Monde" du 10 janvier) nous paraît modeste pour une bonne partie de notre population scolaire : celle qui permettra d’atteindre les deuxième et troisième objectifs que nous avons identifiés. Les questions qui se posent sont les suivantes :

  1. Comment s’articulera le « socle commun », notamment en mathématiques, avec l’ensemble des programmes ?
  2. L’obligation de « garantir à chaque élève les moyens nécessaires à l’acquisition du socle » (article 9 de la loi) ne risque-t-elle pas de donner à celui-ci trop d’importance par rapport à l’ensemble du programme ? Par exemple, le brevet des collèges, qui structure fortement l’enseignement en quatrième et troisième, devra tenir compte des difficultés de certains élèves à assimiler le socle lui-même, notamment en mathématiques – au risque peut-être de négliger des compétences utiles au lycée. Les apprentissages ultérieurs en deviendraient alors plus difficiles, avec pour conséquence l’abandon des voies nécessitant des bases solides en mathématiques, pour lesquelles nous avons pourtant un besoin criant de candidates et de candidats.

Ces questions sont délicates. Nos organisations représentent l’essentiel des professionnels chargés de faire vivre l’enseignement des mathématiques sur le terrain, en contact avec les élèves et les étudiants, à tous les niveaux de notre système éducatif ; elles cumulent un haut niveau d’expertise scientifique et des années de réflexion et de pratique pédagogique. Nous nous étonnons donc de n’être en aucune façon associés à l’élaboration du « socle commun » et d’apprendre par la presse les propositions qui sont faites. En tout état de cause, nous nous tenons à la disposition du Haut Conseil de l’Education pour une réflexion constructive et une aide technique dans l’élaboration concrète du contenu mathématique du « socle commun de connaissances et compétences ».

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