Bulletin Vert n°481
mars — avril 2009

Les démons de Gödel logique et folie

par Pierre CASSOU-NOGUÈS

Éditions du Seuil — 2007
286 pages en 14,5 × 22, ISBN : 978-2-02-092339-2

 

L’auteur est en quelque sorte devenu un spécialiste de Gödel puisque cet ouvrage vient après un autre, intitulé sobrement « Gödel », et publié en 2004 aux Belles Lettres. Il s’agissait alors d’un véritable ouvrage de vulgarisation mathématique même si certains passages, comme le théorème d’incomplétude, étaient de lecture plus délicate.

L’ouvrage publié cette année au Seuil est en quelque sorte un développement du dernier chapitre du livre précédent qui s’intéressait alors à la philosophie de Gödel (voir la recension de Marc Roux dans le Bulletin APMEP n° 452).

Ayant déchiffré une grande partie des papiers de Gödel, l’auteur nous propose un ouvrage de spécialiste retraçant la vie et les états d’âme du célèbre logicien. Il y a là un travail remarquable mais qui n’est en aucune façon un travail de vulgarisation mathématique.

Le livre est très bien écrit, très lisible et l’on suit parfaitement le cheminement de la pensée de Gödel. Mais il s’agit, comme il a été dit, du Gödel philosophe ou théologien et non pas du Gödel mathématicien ou logicien, même si certains paragraphes sont consacrés, bien naturellement, à cet aspect.

Dans une première partie, l’auteur présente Gödel, sa paranoïa et son système de pensée d’une rigueur absolue qui le faisait souvent passer pour « fou » (folie douce).

L’auteur semble capable de se mettre à la place de Gödel pour nous faire comprendre la philosophie du logicien.

La deuxième partie propose une analyse de la façon dont les divers éléments qui fondent une vie s’articulent entre eux dans la pensée de Gödel : objets matériels, animaux, hommes, pensées, intuition, anges et démons, Dieu, … La rigueur de la construction philosophique de Gödel est largement analysée et critiquée par l’auteur.

La partie trois traite de l’incomplétude où après une (trop ?) brève explication de ce que dit ce théorème, l’auteur nous parle de la façon dont Gödel a été amené à sa proposition à partir de sa philosophie et comment ce théorème a été modifié après la thèse de Church et l’introduction par Turing de sa fameuse machine. On y fait beaucoup de métamathématique. Mais on y étudie aussi, comme en rétroaction, l’influence du résultat d’incomplétude sur la pensée et la philosophie de Gödel.

La partie quatre est une parenthèse en ce sens qu’elle traite du logicien Post (qui mourra fou). Cette parenthèse n’est néanmoins pas déplacée dans la mesure où les travaux de Post à partir des années 20 recoupent, avec une quinzaine d’années d’avance, une partie de ceux de Gödel et de Church. Les travaux de Post permettent à l’auteur de donner enfin les étapes essentielles d’une démonstration du théorème d’incomplétude.

La dernière partie s’occupe de métaphysique comme l’indique son titre. Plus exactement, l’auteur y étudie la façon dont la logique mathématique, d’une part, et les idées philosophiques et théologiques, d’autre part, interfèrent entre elles dans l’esprit de Gödel. Ceci est largement expliqué à l’aide de la notion de temps tel qu’il le concevait.

On peut s’étonner qu’ici ou là, l’auteur nous entraîne dans ses rêves (réels ou imaginés), mais c’est une façon de mieux nous faire comprendre la pensée de Gödel.

En conclusion, un excellent travail de philosophie et de logique, que le professeur de mathématiques de terminale lira avec profit pour un travail interdisciplinaire avec son collègue de philosophie. Mais ce ne sera pas une partie facile tant certains aspects de la pensée de Gödel peuvent étonner.

 

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