Bulletin Vert no 272
janvier — février 1970

Assemblée Générale 1970 Rapport d’activité

L’ Association a pour but l’étude des questions intéressant l’enseignement des mathématiques et la défense des intérêts professionnels de ses membres. Elle institue ou encourage des réunions, des discussions, des enquêtes sur l’enseignement des mathématiques en France et à l’étranger. Elle publie un Bulletin qui paraît au moins trois fois, par an

Statuts de l’AP.M.E.P. Art. 1

Si je rappelle pour commencer ce rapport d’activité, en vue de la prochaine Assemblée Générale, les premières lignes de nos statuts qui datent de la création de notre Association (1910), c’est pour réaffirmer d’abord les objectifs auxquels, cette année comme les précédentes, le Bureau s’est voulu fidèle.

Mais pour être exprimés en quelques lignes, ces objectifs nous offrent un champ d’action si vaste qu’il est bien difficile de le cultiver dans toutes ses parties avec le même soin ! De la Maternelle aux Facultés, parmi tous les secteurs où les mathématiques sont enseignées, nous avons voulu cette année nous tenir plus particulièrement mobilisés par tout ce qui concerne la réforme de l’enseignement des mathématiques, en cours ou en préparation et la formation permanente de tous les maîtres.

Le Bureau a voulu répondre ainsi aux soucis de la majorité des membres de l’Association, conformément aux votes exprimés l’an dernier, aux remarques précieuses recueillies sur les bulletins de vote, aux débats lors de l’Assemblée Générale, puis lors des réunions du Comité, aux échos venus des Régionales tout au long de l’année ...

Le « journal de bord » que présente Vissio, notre Secrétaire Général, fait revivre par le menu les différentes péripéties de l’année, jusqu’à cette mi-février, où il nous faut préparer notre rendez-vous de mai. D’ici-là nous ne resterons pas sans rien faire. Ce rapport veut donc essentiellement apporter quelques compléments à ce « journal de bord », préciser les intentions générales de notre action et inviter avec chaleur tous les membres de notre Association à manifester par leurs votes, par leurs réponses aux questions posées, par leurs remarques annexes, leur participation active à la vie de l’A.P.M. 

Pour la réforme de l’enseignement, à tous les niveaux

Après avoir établi un premier projet, fin juin, acceptable déjà tel quel et que nous avons pris l’initiative de publier en septembre 69 (Première étape ... ), la Commission Lichnérowicz a remis ce projet à l’étude au cours du premier trimestre 1969-1970. Les textes remaniés ont été adoptés et rendus officiels par un arrêté ministériel du 2 janvier 1970. Ils seront mis en application à tous les niveaux de l’enseignement élémentaire, à la rentrée prochaine. Ces textes comprennent, outre des considérations générales qui en exposent les intentions, les programmes eux-mêmes accompagnés de commentaires substantiels susceptibles d’éclairer les maîtres sur ce que l’on attend déjà de cette première étape de la rénovation.

Ceux d’entre nous qui ont participé aux travaux de cette Commission ont accepté de partager la responsabilité de cette invitation à une réforme dont seules les personnes vraiment mal informées peuvent prétendre qu’elle n’était pas nécessaire.

Une nouvelle édition de la brochure « Première étape  » est en cours, avec la version officielle des textes. La première édition a été rapidement épuisée et d’ailleurs bénéfique pour nos finances. Il nous faudra maintenant faire une place plus large dans le Bulletin, et peut être sous forme d’autres brochures, à des articles. qui se rapportent à l’enseignement élémentaire. C’est en démultipliant l’information et en développant les échanges au sein de notre Association que nous pourrons, dès l’école maternelle, assurer un enseignement mathématique adapté à l’âge des enfants et capable de contribuer au développement de chacun. Toutes les prophéties que l’on entend parfois... : « ils ne sauront plus calculer... » « cet enseignement sera trop abstrait »... « néfaste pour les moins doués ... « etc. ne sont que paroles sans fondement. Des classes expérimentales fonctionnent depuis 5 ans déjà, et les enfants qui nous ont aidés à préparer cette réforme sont le meilleur témoignage de la réussite que l’on sait en attendre.

Enseignement dans le premier cycle secondaire.

Toutes les classes de Sixième font connaissance avec la matière du nouveau programme depuis la rentrée dernière. Le double bulletin (269-270) que nous avons consacré à cet événement a montré par son volume combien il y avait à dire ! Nous pensons que les collègues n’enseignant pas à ce niveau ont été intéressés par tout ce qui pouvait leur faire connaître la façon dont sont abordées en Sixième des notions auxquelles les programmes n’accordaient aucune place avant le second cycle secondaire. C’est là l’un des aspects de la "modernisation" de l’enseignement que de vouloir préparer de loin l’approche de notions aujourd’hui essentielles, au lieu de paraître les ignorer jusqu’à ce que le moment soit venu d’en faire une étude « savante » avec toute la minutie et le sérieux nécessaires. Alors qu’il n’était venu à personne l’idée de critiquer l’introduction des nombres et des quatre opérations pour les enfants de six ans - étude que l’on fait sérieusement en Terminale C- il est curieux de voir certains craindre de « déflorer » des sujets modernes en les abordant en Sixième (ou même seulement en Seconde).

Le bilan de cette première année de Sixième-nouveau programme ne peut pas être fait aujourd’hui. Les conditions de travail ne sont certes pas ce qu’elles devraient être : les équipes de professeurs de Sixième ne fonctionnent pas partout, et il y a trop peu de réunions entre plusieurs équipes permettant les échanges.et les confrontations sinon celles qu’organise l’A.P.M. En dépit de cela, les professeurs de Sixième et les élèves paraissent nettement favorables au changement survenu.

Perspectives pour les classes de Cinquième et de Quatrième

Elles sont largement évoquées par Vissio. En ce qui concerne le projet de programme pour la classe de Quatrième, je veux simplement insister sur le fait que nous ayons obtenu que ce projet soit remis à l’étude avec la participation de collègues ayant cette année des classes expérimentales de Quatrième, après avoir enseigné dans ces mêmes classes, en Sixième et en Cinquième. Leur expérience est précieuse : elle permet de faire connaître les difficultés qu’ils rencontrent, de faire part de tentatives fructueuses dont on n’a plus à redouter l’extension, etc. D’ici la fin de l’année, ce programme de Quatrième sera vraisemblablement prêt, et élaboré dans les meilleures conditions. Nous souhaitons qu’il soit accompagné de commentaires, comme cela a été fait pour l’enseignement élémentaire.

Le second cycle

Nous avons été particulièrement à l’écoute des réactions venant des collègues qui enseignent cette année en Seconde. Des difficultés attendues pour une première année d’enseignement avec un nouveau programme se sont confirmées. Ces difficultés sont de toutes sortes : elles tiennent à la formation préalable des élèves, au fait que l’on mesure mal a priori la place que doit prendre telle ou telle rubrique, à l’évolution du contenu... Faire face à tout cela a demandé un surcroît de travail important aux collègues chargés de classes de Seconde. La réalité de ces difficultés ne prouve pas que le programme soit lui-même critiquable. L’expérience de la première année permettra d’être plus à l’aise l’année prochaine. Le Bureau a cependant envisagé la possibilité de demander un allègement du programme de la section C, pour ne pas freiner l’entrée dans cette classe à l’issue du premier cycle actuel.

Perspectives pour les classes de Première et de Terminales

Nous regrettons vivement que les programmes de Première n’aient pas encore été publiés. Compte-tenu de cette publication tardive nous envisageons également de demander l’allègement des programmes de C ou le maintien de l’horaire de 7 heures hebdomadaires (qui doit être réduit à 6 h). Il faut qu’après l’année actuelle de Seconde, les élèves trouvent dans les programmes de Première la suite la mieux adaptée au travail entrepris cette année, il faut aussi que l’on ne sous-estime pas le temps nécessaire pour un travail réellement profitable . .. "Une tête bien faite vaut mieux qu’une tête bien pleine ».. quel que soit le contenu.

A propos de ces programmes. nous espérons que des Commentaires seront élaborés de la même façon que pour ceux qui accompagneront le programme de Quatrième, et publiés avant la rentrée. Je dois, en évoquant de nouveau cette question dire franchement notre regret qu’une collaboration sincère entre notre Association et l’Inspection Générale de mathématiques n’ait pas encore trouvé dans ce travail en commun l’occasion de s’affirmer à d’autres niveaux qu’à celui de renseignement élémentaire.

Pour la formation permanente des maitres

La mise en place de la réforme rend plus aigu le besoin de s’informer de chercher avec d’autres les manières possibles d’aborder de nouveaux sujets d’étude, et demande plus de temps pour ce travail que pour celui dont on avait l’habitude.
Nous renouvelons donc à tout moment nos demandes concernant :
 la création des IREM dans toutes les académies,
 l’organisation de stages d’information et de discussion en commun.
 les décharges de service (1h hebdomadaire pour tous les professeurs enseignant un nouveau programme pour la première année - décharges effectives pour les professeurs chargés de classes expérimentales ainsi que pour ceux qui participent aux stages assurés par les IREM).

Au mois de septembre, nous avons eu sur ces différents points un long entretien avec des membres du Cabinet du Ministre chargés d’étudier ce problème de la formation permanente. Nous espérons que Je Ministre lui-même voudra bien nous recevoir d’ici la fin de l’année ... Il est urgent que l’Education Nationale se décide à faire l’effort nécessaire pour améliorer son rendement, qu’elle sache obtenir les moyens indispensables ... ou mieux utiliser ceux dont elle dispose.

En ce qui nous concerne, il est évident que nous nous réjouissons de tout le travail fourni dans chaque Régionale (ou presque). Nous pensons que tout cela contribuera à enrichir notre "Bibliothèque d’enseignement mathématique"
et à rendre nos Commissions (qui permettent la confrontation sur le plan national
des idées de tous) plus actives. On sait le travail fourni par la Commission du dictionnaire, dont l’ardeur ne faiblit pas.

Des contacts ont été pris avec les Physiciens (de l’Union des Physiciens), des réunions mixtes ont déjà lieu. à propos des émissions produites par la Télévision scolaire. Cela doit nous apporter
des indications précises sur les besoins et les tendances actuelles de l’enseignement.
dans nos deux matières. Il est nécessaire que les professeurs de mathématiques
sachent à quelles situations expérimentales ils peuvent faire appel pour
motiver l’introduction de notions mathématiques ou pour les utiliser ... et que les
Physiciens sachent quelles notions mathématiques, quels « modèles mathématiques" peuvent leur être les plus utiles pour traduire des phénomènes connus par l’expérience.

Il est indispensable aussi que l’on abandonne le préjugé simpliste affirmant que 1a soi-disant « rigueur » du mathématicien, est en opposition avec « l’à peu près" du physicien ... Nos élèves ont souvent cette impression (et cela ne date pas d’hier !), qu’en physique, on fait des mathématiques fausses, et sont tout prêts à s’indigner de tels sacrilèges. Le manque de compréhension des points de vue de chacun est évident ... Lorsqu’on calcule \((1+ \epsilon)^{2}\), négliger \(\epsilon^2 \) n’a rien de sacrilège ! Ce qu’il faut savoir, c’est que les incertitudes expérimentales rendent tout à fait inutile la présence de cet e2 dans les calculs du physicien.

En ce qui concerne la formation permanente des maîtres de l’enseignement élémentaire, une réunion A.P.M, aura lieu le 15 mars à Limoges.

C’est en poursuivant cet effort de coordination de coopération entre nous tous, enseignant au même niveau ou à des niveaux différents, entre nous-mêmes et les autres... que le Bureau pourra continuer à être un interlocuteur représentatif et écouté auprès de l’Administration et auprès de toutes les organisations qui entretiennent des relations avec nous.

Depuis plus de dix ans, l’A.P.M. a multiplié ses efforts pour apporter d’abord à tous ceux qui n’avaient pas bénéficié au cours de leurs études d’un enseignement leur ayant permis de connaître l’évolution contemporaine des mathématiques, l’information solide qui leur manquait et surtout l’’envie de compléter par eux-mêmes cette information. Cela démontre amplement, s’il le faut, le souci qu’ont toujours manifesté ceux qui pendant cette période ont été responsables de l’action engagée par l’Association, de ne pas entreprendre une réforme à l’aventure ... Le souci de ne pas laisser l’enseignement élémentaire en marge de cette réforme montre aussi importance attachée à la continuité de la formation des élèves, et de tous, non seulement de ceux qui, pour des raisons diverses, pourront poursuivre des études longues. Il n’a jamais été question de vouloir sacrifier les uns au profit des autres ...

Aujourd’hui cette réforme est enfin amorcée ou près de l’être. J’ai cru entendre parler d’ « improvisations » ... Pour quelle raison, sinon pour éviter une telle improvisation l’A.P.M. a-t-elle étoffé ses Bulletins, publié des cours, organisé des conférences, participé aux émissions télévisées dont le titre (Chantiers Mathématiques) est le symbole de cette volonté de construire, demandé la création des lREM ?

Le Bureau. cette année s’est voulu fidèle à cette ligne de conduite. Il souhaite obtenir l’appui très large des membres de l’Association pour que cette action ne soit pas dénaturée dans l’avenir mais au contraire renforcée. Nous avons notamment besoin de nous donner des moyens de gestion plus conformes à l’accroissement de notre effectif. Le principe de l’acquisition d’un local a été retenu lors de la dernière Assemblée Générale. Je ne désespère pas de pendre la crémaillère avant de céder la place que j’ai l’honneur d’occuper, à mon successeur.

Comme l’année dernière, je demande à tous de nous dire leur approbation ou s’ils nous désapprouvent sur certains points. de le dire aussi et de le justifier, afin que le prochain Comité et le Bureau qui en sera le représentant tiennent compte de toutes ces observations. Rares sont les indifférents, nous le pensons, mais nous avons l’impression que trop de collègues ne mesurent pas assez l’importance de ce geste qui consiste pour le moins à placer quelques croix dans quelques cases, à écrire son nom et à se servir de l’enveloppe prévue ...

Cette année nous nous efforçons de préparer ce Bulletin assez tôt pour qu’il arrive à la rentrée des vacances de Pâques. Chacun aura ainsi le temps de réfléchir et de répondre. Pour que le futur Bureau sache mieux dans quelles directions faire porter son effort une Commission a préparé une liste d’objectifs pour lesquels nous demandons que l’on choisisse un ordre de priorité. Notre objectif essentiel pour les dernières années : mettre en œuvre la réforme de l’enseignement élémentaire et en Sixième, créer des structures permettant la formation permanente (les IREM) a été presque atteint.

Nous savons bien que cela ne suffit pas et qu’il faut obtenir les moyens de bien réaliser cette réforme et de la continuer. On lira notamment des propositions concernant l’ animation pédagogique.

Le Bulletin continuera à rendre compte des expériences, des témoignages. Un numéro spécial sur la classe de Cinquième est en chantier. Un autre le sera peut-être sur la classe de Seconde, un autre encore sur l’enseignement élémentaire. A côté de cette information mathématique et pédagogique, nous aimerions répondre aux souhaits de toute nature que nous recevons : un nouvel adhérent, étudiant ipésien nous a demandé des articles de nature à lui faire mieux connaître son futur métier ... J’espère tout au moins qu’il nous contera lui-même le jour venu ses débuts de professeur, et saura ainsi répondre à l’avance à d’autres attentes telles que la sienne.

Au moment de conclure je veux surtout renouveler mon appel pour que cette année, alors que nous allons pour la première fois confier à ordinateur le dépouillement des votes, cela en vaille vraiment la peine ! Nous sommes plus de 10 000, ce qui rend impensable un dépouillement « à la main » , mais quasi enfantin le même travail « à la machine » Et je souhaite avant tout que l’écho que la machine nous rendra soit celui de l’unité, de l’amitié qui nous lie tous, d’abord au sein de chaque régionale, puis par delà ces territoires sans frontières (heureusement) d’un bout à l’autre du pays et jusque dans les régions lointaines où demeurent des « membres de l’A.P.M. » (En passant je leur annonce que dorénavant leurs bulletins arriveront dans des emballages plus résistants et plus vite, grâce à l’obligeance de l’un de nous qui accepte de se charger de toutes ces expéditions). Il me vient d’ailleurs, à l’idée que nous pourrons bien adopter quelque emblème pour nous reconnaitre !

Que cette amitié, que la poursuite du travail en commun nous fasse apprécier toujours davantage un métier qui ne cessera jamais de nous étonner.

Madame M. A Touyarot.

Télécharger l’article en pdf dans son intégralité
<redacteur|auteur=13>

Les Journées Nationales
L’APMEP

Brochures & Revues
Ressources

Actualités et Informations
Base de ressources bibliographiques

 

Les Régionales de l’APMEP