Pourquoi enseigne-t-on les mathématiques ? Que sont les mathématiques ?

Pourquoi enseigne-t-on les mathématiques ?

L’idée était de faire réfléchir les élèves à ce que sont les mathématiques ou pourquoi on les enseigne.

Plutôt que de faire un exposé magistral, j’ai préféré noter les questions au tableau, noter les réponses des élèves, pour ensuite les commenter et compléter, tout en essayant de placer quelques résultats mathématiques. Je n’ai distribué en début d’heure que la feuille de synthèse des théorème qui pouvait donner des idées de questions aux élèves.

Je n’ai donné le texte complet de mes réponses qu’aux élèves qui l’ont demandé à la fin.
Dans les faits, le temps idéal pour cette intervention est plutôt de 1h30, de manière à avoir le temps de répondre aux questions des élèves (notamment du type : pour tel métier, à quoi servent les maths ? ou à quoi peut servir tel chapitre qu’on a étudié en classe ?).

L’expérience m’a cependant montré que ces derniers ont peu de questions et encore moins de réponses (à part « le charpentier utilise le théorème de Pythagore »). Donc
je crois qu’un tel exposé est plutôt utile.

Et au fait, qu’est-ce que les mathématiques ?

En tant que professeur de mathématiques, mais surtout en tant que personne qui aime les maths et à qui les maths ont beaucoup apporté (dans ma formation et dans la vie de tout les jours), je me pose des questions sur le manque actuel de vocations pour cette discipline (et pour les sciences en général). Je me suis notamment interrogé sur le rôle et l’utilité des mathématiques pour moi qui les avait étudiées (ce que j’avais fait par simple goût) et surtout pour ceux à qui j’allais les enseigner, souvent contraints à étudier les maths, rarement passionnés par elles. Trois questions me paraissent fondamentales :

  1. Pourquoi l’enseignement des mathématiques est-il obligatoire (au-delà du savoir compter) ? Pourquoi les maths ont-elle en France autant d’importance, au point de servir de critère de sélection même pour des professions qui ne les utiliseront plus ?
  2. Qu’est-ce qui plaît dans les maths à ceux qui les aiment ? Qu’est-ce qui en fait un cauchemar pour d’autres ?
  3. Qu’est-ce que faire des mathématiques ?

 

Explication de ces questions

  • La première question me paraît d’autant plus cruciale qu’on a tendance à y répondre brièvement que les maths servent partout, alors que les élèves savent très bien qu’une grande partie d’entre eux n’y toucheront plus passés les concours et examens. Il faut être honnête, les théories mathématiques apprises à l’école ne serviront pas en tant que telles à la plupart de ceux qui les étudient. Si dans beaucoup de métiers on PEUT utiliser des maths si on le souhaite, il y en a beaucoup aussi où on peut s’en passer. D’où l’importance de ma première question.
  • La deuxième question fournit une autre approche : puisque la plupart d’entre vous sont obligés d’étudier les maths (et les profs sont obligés de les enseigner à des élèves qui n’en veulent pas), y a-t-il moyen de ne pas les détester, voire de les aimer un peu ?
  • Au fait, après tant d’années à étudier des maths, savez-vous bien de quoi il s’agit ? Et savez-vous quoi attendre de la suite de vos études si vous continuez les maths ?

Ces questions me paraissent cruciales, et j’ai l’impression que du temps où j’étais à l’école on ne m’avait jamais proposé d’y réfléchir. Vous avez cette chance, essayez d’y répondre par vous-mêmes. C’est une manière de devenir acteur de votre propre apprentissage, et de ne plus le subir. Vous pourrez ensuite lire, si vous le souhaitez, les réponses (personnelles et subjectives) que je donnerais en ce moment.

 

Faire des mathématiques

Au lycée, quand on ne comprend pas, on a tendance à résumer un chapitre par la dernière formule du chapitre, la plus difficile, et celle qu’on n’a pas comprise en général. Ainsi faisant on oublie que le plus important de l’activité mathématique était ailleurs, dans tous les préliminaires...

Voici donc (avec des exemples) la présentation des différents aspects de la démarche mathématique.

 

La définition

Les questions les plus profondes sont parfois les plus simples. Définir précisément les objets que nous manipulons depuis toujours (on appelle ça « axiomatiser ») afin de déterminer un point de départ pour démontrer des propriétés plus complexes.

Savez-vous par exemple ce qu’est un nombre ? (Ou plus simplement « un nombre entier, un nombre rationnel, un nombre réel). Une question que l’on peut se poser est alors : un martien qui inventerai les maths sans rien connaître des mathématiques terrestres, serait-il conduit à inventer les mêmes nombres ? (bien sûr, il ne leur donnerait pas le même nom).

Ou encore : qu’est-ce qu’un plan ? un vecteur ? une fonction ? la forme d’un objet ? Peut-on passer d’un cube à une boule en tirant dessus ? Et d’une boule à un donuts ?

Qu’est-ce qu’une probabilité ?
Essayez alors de calculer la probabilité qu’une corde prise au hasard sur un cercle soit plus courte que le côté d’un triangle équilatéral inscrit dans ce cercle ? Cet exercice s’appelle le paradoxe de Bertrand. Quand vous avez la solution (il y en a plusieurs, avec des résultats différents !!), jetez un coup d’œil sur le site de Thérèse Éveilleau.

Qu’est-ce qu’une surface ou un volume ?
Intuitivement, c’est quelque chose qui mesure la taille d’une figure (dans le plan ou l’espace) et qui vérifie une propriété simple : le volume de la réunion de plusieurs (2, 10 ou un nombre fini) figures disjointes est la somme des volumes de ces diverses figures. Pourtant, Banach et Tarski ont montré qu’on pouvait (théoriquement) couper une boule en un nombre fini de morceaux, déplacer ces morceaux et les réarranger (comme un puzzle) pour en faire une boule de rayon deux fois plus grand. Ce qui fait qu’on pourrait théoriquement découper en morceaux un petit pois et en faire une boule de la taille du soleil !!! Ce paradoxe montre que la notion de volume est délicate, et qu’il faut la définir proprement (et pour des formes « simples » uniquement). Curieusement, ce paradoxe n’a pas lieu dans le plan avec les surfaces...

 

Les notations

Le deuxième aspect capital des mathématiques, négligé par le débutant, est celui des notations : les maths sont un langage qui crée des mots nouveaux et des règles nouvelles qui permettent de décrire de plus en plus précisément des notions.

Des « détails », comme l’introduction des chiffres indo-arabes (avant, seul les grands fonctionnaires savaient poser des multiplications !), des signes \(=\), \(+\), \(x\), etc. et de donner un nom (\(x\)) aux inconnues, a fait faire aux mathématiques des bonds de géants en mettant à la portée de collégiens des opérations jadis très difficiles. La notion de dérivée, telle que l’apprend aujourd’hui n’importe quel lycéen de première occupait à l’origine plusieurs livres !!!

Donc chacune des notations que l’on utilise aujourd’hui est en fait un condensé qui résume des siècles d’évolution, d’enrichissement, de recherches. D’où l’importance de la rigueur et la précision dans leur utilisation. Ce travail sur les notations continue d’ailleurs…

 

La démonstration

Une fois précisées les notions, reste à se mettre d’accord sur les règles de raisonnement et donc de démonstration. Cette notion a évolué (les grecs par exemple utilisaient des « démonstrations par des figures... »).

La question qu’on peut se poser est alors : peut-on tout démontrer ? Autrement dit, est-ce que toute propriété mathématique qui n’est pas fausse est démontrable ?

C’est Gödel et son célèbre théorème d’incomplétude qui a répondu par la négative : dans toute théorie, quel que soit le nombre d’axiomes initiaux que l’on choisi, il existe des propriétés qui ne peuvent être démontrées, mais telles que leur contraire ne peut pas être démontré non plus... Ceci veut dire qu’il existe des propriétés vraies qu’on ne peut pas démontrer, et des propriétés dont on ne peut pas dire si elles sont vraies ou fausses, mais qu’en plus on a le choix de les considérer vraies ou fausse !

 

Les calculs proprement dits

Ceci est l’aspect le mieux connu des mathématiques : la résolution de problèmes et d’équations, le calcul pratique de ces solutions. Ces équations peuvent venir de la physique (vous en verrez un certain nombre l’an prochain : lois de Newton pour la mécanique, équations d’un circuit électrique), de l’informatique (si on fait des images de synthèse, comment calculer le déplacement d’un personnage ?).

Savez-vous par exemple quel la navigation et le GPS utilisent la géométrie que vous faites depuis le collège ? Que la cryptographie (codage des données pour qu’elles ne puissent pas être lues par n’importent qui) fait appel à des maths que l’on aborde en spécialité maths de TS ? Que le moteur de recherche Google utilise et résout des systèmes de 500 millions d’équations avec autant d’inconnues ?

C’est d’ailleurs souvent ces applications (qui ont des enjeux économiques et stratégiques énormes) qui ont commandé le développement de nouvelles branches mathématiques, et qui font que les mathématiciens sont et seront toujours extrêmement recherchés.

 

Les problèmes d’existence

Ceci dit, lorsque les calculs proprement dits n’aboutissent pas, où lorsqu’on ne dispose pas de formules, on se contente de s’interroger sur l’existence de solutions à un problème. Vous savez résoudre une équation de degré 2. Il existe des formules permettant de résoudre des équations de degré 3 et 4. Longtemps on a cherché des formules pour le cinquième degré avant que Galois ne montre qu’ « il n’y a pas de formule pour résoudre les équations de degré 5, et qu’en plus bien que la solution existe théoriquement, on peut en calculer seulement des valeurs approchées . Par exemple, on sait qu’on ne peut pas exprimer les racines du polynôme \(x^5 - 4x + 2\), alors qu’une simple étude de fonctions de première permet d’en donner un encadrement.

Au fait, dans le domaine de la géométrie de collège, y a-t-il d’autres transformations conservant les distances (isométries) que celles vues en collège (symétries, rotation, translation) ? La réponse en cours de spécialité maths de TS…

 

Aimer ou pas les maths

Ce que l’on peut aimer dans les maths :

  • Les choses sont simples, au sens où elles sont soit vraies soit fausses. Quand on est dans le vrai, on n’aura pas de mal à en convaincre les autres. Quant on a répondu à une question, on sait en général si la réponse est bonne, on n’a pas besoin d’y revenir, ce qui fait qu’on peut aller plus loin.
  • Il y a de l’élégance dans les théories mathématiques, de par leur simplicité et leur concision. Le savoir ne s’accumule pas comme dans les autres domaines. En maths on peut faire beaucoup en apprenant très peu par cœur (comprendre plutôt qu’apprendre). Par exemple, le programme de TS complet tient dans une feuille simple (un recto), le programme de maths spé (12h par semaine) avec toutes les démonstrations et des notions hors programme tient en une feuille double !
  • C’est un instrument très puissant. On peut très vite arriver à des résultats et des applications qui paraissaient hors de portée (et que malheureusement les programmes de lycées ne donnent pas le temps de développer en cours). D’ailleurs, bien maîtriser les maths permet d’aborder beaucoup plus facilement les autres sciences (notamment la physique).
  • C’est un jeu formel et logique qui stimule la réflexion (un peu comme les jeu logiques, échecs, Sudokus, mais bien sûr en plus complexe) et, une fois qu’on en a maîtrisé quelques bases, il peut devenir très gratifiant.

Ce qui rend les maths difficiles pour certains :

  • Les maths sont un langage : pour faire des choses intéressantes il faut d’abord en maîtriser la grammaire et l’orthographe. Il y a donc des règles qu’il faut apprendre à appliquer automatiquement, sans les remettre en question, sans les oublier, comme en français. D’ailleurs, les maths scolaires sont parfois plus proches dans l’esprit des cours de grammaire que des autres cours de sciences. On peut remarquer que ces mêmes raisons font que orthographe et grammaire sont en général aussi détestés que les maths...
  • Il faut de la rigueur, qui est une forme de discipline : plus qu’ailleurs il faut ici appliquer des règles, ne pas se contenter d’à-peu-près. Cela s’apprend, mais c’est difficile. Ce qui fait que la plupart sont découragés par les maths bien avant de franchir cet obstacle, et d’atteindre les moments gratifiants, ceux où l’on comprend.
  • Les maths sont exigeantes : si l’on veut assimiler le langage, il faut de la pratique, et cela demande (à tous, même aux meilleurs) des efforts, de la patience et du travail en dehors des cours. On ne peut pas espérer sortir de cours en ayant tout retenu. Il y a certes une grande gratification quand on vient à bout d’une difficulté, mais c’est vrai qu’il y a aujourd’hui des distractions plus immédiates...

 

Pourquoi enseigner les mathématiques ?

J’ai souligné en introduction que les théories mathématiques enseignées à l’école ne serviraient pas à la plupart des élèves. Cependant, on pourrait dire de même de la plupart des enseignements scolaires : aucun enseignement ne « sert » directement, si ce n’est lire/écrire, etc. Pourquoi l’école alors ? Pour mettre en place une capacité d’expression et de raisonnement, qui permettra ensuite de vivre en société, réfléchir, et apprendre rapidement les savoirs pratiques dont vous pourriez avoir besoin par la suite : conduire une voiture, faire une mise en page sur un traitement de texte, installer un logiciel sur un ordinateur, etc. Si ces tâches s’apprennent vite, c’est grâce au travail préparatoire effectué par l’école.

En particulier, en ce qui concerne les maths, j’ai l’impression que c’est la matière qui donne le mieux des rudiments de logique (distinguer cause et conséquences, hypothèse et conclusion). En maths, on apprend à distinguer ce qu’on sait avec certitude (qu’on ne remettra pas en question) de ce dont on n’est pas sûr, et ceci servira partout. Et c’est loin d’être maîtrisé par la plupart !

Au contraire, si on enseignait à l’école uniquement ce qui sert directement : écrire un CV, utiliser un tableur, faire une facture, rédiger des lettres officielles, je ne suis pas sûr que cela paraîtrait super-passionnant. C’est une chance et un luxe de pouvoir se permettre de penser à autre chose que la stricte survie immédiate, vous ne l’aurez pas toujours, sachez l’apprécier.

À côté de cela, s’il est vrai que les maths ne servent pas à tous, elles peuvent servir dans beaucoup de domaines, si bien qu’elles sont une compétence recherchée (pas de problèmes de débouchés pour les professions scientifiques en général). D’ailleurs, s’il est vrai que beaucoup exercent des métiers très éloignés de leur discipline d’études (par exemple toutes les professions commerciales), ceux qui choisissent une profession en liaison avec les sciences (donc des maths) ont plus souvent la chance de continuer à en faire, et d’avoir donc un travail intellectuellement plus stimulant. Et puis, il faut en être conscients, ceux qui innovent aujourd’hui (et qui donc permettent à leur pays de s’en sortir dans la compétition économique), ce sont les scientifiques, et ils maîtrisent les maths comme il se doit (vous connaissez sûrement quelques noms : Eiffel, Bouygues, Bertin...). Avoir des bons rudiments de maths (et de sciences) permet au moins de comprendre ces innovations, et ne pas les laisser passer...

 

Récapitulatif de jolis théorèmes mathématiques

(que j’aurai peut-être mentionnés dans mon exposé)

  • Si les martiens faisaient des maths, ils seraient conduits à inventer (aux notations près) les même nombres que nous (entiers, relatifs, rationnels, réels, complexes), car il n’y en a pas d’autres. On peut d’ailleurs dire cela de l’essentiel des mathématiques.
  • Paradoxe de Banach-Tarski
    On peut (théoriquement) couper une boule en un nombre fini de morceaux, déplacer ces morceaux (sans les déformer) et les réarranger (comme un puzzle) pour en faire une boule de rayon deux fois plus grand. Ce qui fait qu’on pourrait théoriquement découper en morceaux un petit pois et en faire une boule de la taille du soleil !!!
  • Théorème d’incomplétude (Gödel)
    Dans toute théorie mathématique non contradictoire, quel que soit le nombre d’axiomes initiaux que l’on choisi, il existe des propriétés qui ne peuvent être démontrées, mais telles que leur contraire ne peut pas être démontré non plus... Ceci veut dire qu’il existe des propriétés vraies qu’on ne peut pas démontrer, et des propriétés dont on ne peut pas dire si elles sont vraies ou fausses, mais qu’en plus on a le choix de les considérer vraies ou fausse !
  • Théorème sur les jeux finis à information parfaite
    Tout jeu fini (avec un nombre fini de possibilités) et information parfaite (chaque joueur dispose des mêmes informations que son adversaire, comme la position des pions, etc.) possède une stratégie gagnante telle qu’en la suivant, l’un des deux joueurs est assuré de gagner, quoi que fasse l’autre, ou alors il existe une stratégie qui assure à chaque joueur de faire match nul (et de gagner si l’autre se trompe). Ceci marche pour le morpion, les échecs, les dames, mais pas pour les jeux de cartes (le hasard intervient, et en plus on ne connaît pas les cartes de l’adversaire).
  • Un autre théorème de théorie des jeux
    Un commerce veut faire concurrence à un commerce déjà existant. La stratégie pour prendre le plus de parts de marché c’est de se placer… au même endroit. Voilà pourquoi les Quick sont souvent en face des McDo, ou pourquoi les banques ont aussi des agences très proches les unes des autres.
  • Théorème de la boule chevelue
    Si l’on essaie de coiffer une boule recouverte de cheveux, il restera toujours au moins un cheveux en épi (c’est-à-dire « vertical »).
  • Théorème d’Arrow-Debreu
    Soit une économie de marché avec un nombre \(n\) de biens. On suppose que les fonctions d’offre des producteurs et de demande des consommateurs pour chacun des produits ne présentent pas de discontinuité. Alors il existe au moins un prix d’équilibre, c’est-à-dire que l’offre est égale à la demande pour chacun des biens.
  • Théorème de d’Alembert
    Toute équation polynomiale (comme par exemple \(x^5 + 2 = 0\) ou \(x^5 - 4 x + 2 = 0\)) de degré \(n\) admet exactement \(n\) solutions. Celles-ci ne sont pas toutes réelles, il faudra faire appel aux nombres complexes que vous verrez en Terminale.
  • Il existe des formules permettant d’exprimer (avec des racines carrées, cubiques, etc.) les solutions d’équations polynomiales jusqu’au degré 4. À partir du degré 5 on sait reconnaître celles pour lesquelles c’est possible de le faire. Pour \(x^5 + 2\) on peut, pour \(x^5 - 4x + 2\) on ne peut pas... (théorie de Galois).
  • Si on marche au hasard en faisant à chaque fois (avec même probabilité) un pas dans une direction quelconque, alors en étant suffisamment patient on va passer partout. (Autre version : un singe tapant au hasard sur une machine à écrire finira par composer à la virgule près l’Odyssée entière, ou n’importe quel autre livre. Le moteur de recherche Google procède ainsi pour parcourir la toile. Ce résultat cesse d’être vrai en dimension 3 : on est sûr que dans l’espace il y a des endroits où on n’ira jamais (mais on ne peut pas dire à l’avance où il seront).
  • Conjecture de Goldbach
    Tout nombre entier pair est somme de deux nombres premiers. Ce résultat en apparence si simple et vérifié par le calcul pour des millions de nombres entiers n’a jamais pu être démontré. Il est presque aussi célèbre que le théorème de Fermat (qui n’a été démontré que très récemment) : il n’y a pas d’entiers \(x\), \(y\) et \(z\) vérifiant \(x^n + y^n = z^n\) pour \(n\) supérieur ou égal à 3.
  • On peut décomposer une fonction quelconque en une somme (infinie) de fonctions sinusoïdales (cosinus et sinus) appelées harmoniques. On appelle cette décomposition « série de Fourier », c’est elle qui permet de simplifier les signaux sonores pour obtenir par exemple des fichiers compressés comme les MP3.

 

Annexe
Quelques exemples d’applications de l’esprit mathématique

Je vais donner ici quelques exemples d’applications de l’esprit mathématique à des domaines que j’ai eu l’occasion d’étudier, pour montrer que les maths donnent des arguments intéressants dans des domaines qui en semblent très éloignés. Ces parties sont assez désordonnées, mais il faudrait du temps pour préciser. Si parmi vous certains ont envie de creuser certaines questions, c’est possible de prendre 1h pour le faire (parlez-en à votre prof).

 

Économie

Pour critiquer cette conclusion, les meilleurs arguments sont d’ordre mathématique. La réalité est bien plus complexe, puisqu’il y a un grand nombre de produits différents, autant de prix, d’offres et de demandes. Que se passe-t-il alors ? Il a été prouvé que dans ce cas aussi il existe un (ou plusieurs) prix d’équilibre, donc la loi d’offre et de demande marche encore, c’est le théorème de Arrow-Debreu. La démonstration de ce théorème utilise une propriété très jolie mais qui apparaît très lointaine : le théorème de la boule chevelue qui dit que si l’on essaie de coiffer une boule recouverte de cheveux en donnant des grands coups de peigne, alors il y a forcément au moins un cheveu qui reste en épi (verticalement). Comment passer de ce cheveu en épi à un prix d’équilibre ? Demandez aux mathématiciens…

Cependant, toujours d’autres mathématiciens ont démontré que si l’on laisse jouer l’offre et la demande à partir d’un prix quelconque comme nous l’avons fait sur la figure, la convergence a très peu de chances de se produire. Donc tout ne se passe pas toujours comme le voudraient les libéraux…

D’ailleurs, si on autorise la fonction d’offre à faire des sauts (on dira en Terminale « être discontinue ») alors ces résultats deviennent caduques, et la situation se complique. Quoi qu’il en soit, les débats entre économistes prennent souvent une forme mathématique, et il vaut mieux avoir des notions de maths si on veut comprendre.

 

Théorie des jeux et probabilités

D’abord ici un joli résultat (qui se démontre simplement avec des outils de TS) dû à la théorie des jeux : tout jeu fini et à information parfaite possède une stratégie gagnante. Ceci veut dire que dans un jeu comme le morpion, les dames ou les échecs, soit il existe une stratégie qui permet au premier joueur de gagner à coup sûr quoi que fasse le deuxième, soit c’est l’inverse, soit alors il existe deux manières de jouer qui conduisent au match nul, et si l’un des joueurs se trompe en l’appliquant il perd . Les échecs seraient donc exactement comme le morpion un jeu sans intérêt, à condition d’avoir des ordinateurs suffisamment puissants pour calculer cette stratégie gagnante !! (Ce pour quoi il faudra attendre encore longtemps…)

Autre exemples de questions que pose la théorie des jeux : imaginons de disposer de 10 euros, d’avoir absolument besoin de 100 euros et de n’avoir pour seule possibilité que de jouer les 10 euros à la roulette (où l’on sait que l’on perd en moyenne). Comment les jouer si on veut maximiser ses chances d’atteindre 100 euros ?

D’ailleurs, puisqu’on est dans les jeux de hasard, parlons-en. C’est un domaine où l’ignorance de certains principes mathématiques est particulièrement flagrante. Savez-vous quelle est l’espérance de gain (c’est-à-dire le taux de redistribution) des jeux du commerce ? 80 % pour les machines à sous, 70 % pour le PMU et 60% pour les jeux de la française des jeux. Ceci veut dire qu’à chaque fois qu’on achète un jeu à gratter, on perd 40 % de la mise. Comment cela se fait-il que les gens ont l’impression de n’être ni perdants ni gagnants ? D’ailleurs, si on rejoue plusieurs fois jusqu’à tout perdre, ou alors jusqu’à gagner une grosse somme, le gain moyen est bien en dessous de 60 % de la mise…

Autre idée curieuse, c’est d’observer les stratégies des joueurs, qui n’ont pas compris le principe de tirages indépendants. Jouer au loto le numéro gagnant de la veille n’est pas une stratégie moins bonne qu’une autre. Comment cela se fait-il que certains consultent les statistiques des numéros sortis au cours des dernières années de manière à déterminer ce qu’ils vont jouer. J’ai connu de même un type qui faisait des statistiques des numéros du Rapido du jour pour tenter de déterminer les « numéros gagnants ».

Au PMU, les joueurs n’ont pas compris le principe de redistribution des gains, qui rend l’État complètement indifférent aux résultats. Ils sont convaincus que ce dernier truque les résultats de manière à les faire perdre, ce qui n’a pas de sens. D’ailleurs, en allant plus loin concernant le PMU, je suis convaincu qu’on pourrait démontrer que de jouer au hasard, ou jouer exprès les plus mauvais chevaux ou faire de son mieux pour se renseigner et jouer les meilleurs chevaux ne change rien, l’espérance de gain reste la même. En jouant les bons, on gagnera plus souvent mais moins, c’est seulement la variance qui change !

Pour conclure cette partie un peu désordonnée sur les probas, je voudrais donner un résultat qui ne concerne pas les jeux de hasard mais que je trouve joli. Imaginez que vous marchez au hasard, les yeux fermés, en faisant à chaque fois un pas en avant, en arrière ou sur le côté : de cette manière, en étant suffisamment patient, vous êtes sûrs de passer partout (en chaque point du plan). (Par contre, dans l’espace (en rajoutant la possibilité d’aller vers le haut ou vers le bas), ce résultat ne marche plus.) Autre version de se théorème : un singe qui taperait au hasard sur une machine a écrire aura un jour écrit l’Odyssée (à la virgule près), et aussi tout autre livre, à condition bien sûr d’être très patients. Ce principe est à la base du fonctionnement de Google : le moteur de recherche se promène au hasard de page en page et note les pages où il passe plus souvent (celles qui seront bien cotées). Cette recherche conduit d’ailleurs à un système de 500 millions d’équations et autant d’inconnues (une par page !!) dont on doit trouver une solution…

 

Arithmétique de l’infini

Le paradoxe de Banach-Tarski montre qu’on peut théoriquement découper un petit pois en un nombre fini de morceaux que l’on réarrange ensuite comme un puzzle pour obtenir une boule (pleine) de la taille du soleil. Ceci pose naturellement des questions sur ce qu’on appelle un volume en maths.

Bien sûr, en physique ce découpage du petit pois sera impossible, notamment parce que le petit pois physique aura un nombre fini d’atomes, moins nombreux que ceux composant le soleil, et les déplacements ne modifient pas le nombre d’atomes. En maths, cela c’est différent car la boule contient une infinité de points (qui sont des être mathématiques sans dimension). Or l’infini est une notion qui a très longtemps posé problèmes aux mathématiciens, car il suscite de nombreux paradoxes. Celui qui suit est plus simple que celui de Banach-Tarski mais vous donnera une idée du principe sur lequel il s’appuie.

C’est l’histoire de l’hôtel de Hilbert : un hôtel possède une infinité de chambres portant chacune un numéro entier. Cet hôtel est complet. Pourtant, il est possible d’y accueillir des clients supplémentaires, même en nombre infini. Par exemple : pour accueillir un client en plus, il suffit de mettre celui qui occupait la première chambre dans la deuxième, celui de la deuxième dans la troisième, celui de la troisième dans la quatrième, de cette manière on libère la première chambre. Pour faire de la place à une infinité de clients ils suffit de déplacer chaque client occupant une chambre dans la chambre portant un numéro double du numéro initial : tous les anciens clients gardent une chambre, et on a libéré une infinité de chambres (celles impaires) pour les nouveaux clients !!!

Cet exemple montre que l’infini plus un ou deux fois l’infini ne sont pas plus grands que l’infini : il y a donc autant de nombres entiers positifs que de nombres entiers tout court ou que de nombres pairs !! Plus fort : on pourrait mettre dans notre hôtel (déjà plein) une infinité de cars contenant chacun une infinité de nouveaux touristes, sans que la place ne manque. Une infinité d’infinités contient donc autant d’éléments que l’infini de départ. Par exemple, il y a autant de nombres rationnels que de nombres entiers !

Le paradoxe de Banach-Tarski s’appuie ce type d’idées. Pour aller plus loin, on pourrait montrer que tous les infinis ne se valent pas, et que certains sont plus grands que d’autres : par exemple, il y a beaucoup plus de nombres réels dans l’intervalle \([0 ;1]\) ou de points sur une droite que de nombres entiers ou rationnels.

 

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