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Un triangle équilatéral et des graphiques

François Drouin [1] 

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ABC est un triangle équilatéral tel que
AB = AC = BC = 10 cm.
Où placer le point M pour que la somme des
distances de ce point aux côtés du triangle soit
minimale (la somme ME + MF + MG doit être
la plus petite possible) ?

Cet énoncé a été proposé dans une classe de quatrième
ayant déjà rencontré des situations de
recherche dans le cadre d’une recherche PARI [2]
« IREM-IUFM » intitulée « activités de recherche
au service de l’apprentissage des mathématiques
 ».

La relation de son déroulement est extraite du document final accessible à l’adresse
http://www3.ac-nancy-metz.fr/pasi/IMG/545557Colleges2006.pdf

L’activité a été proposée quelque temps après l’étude de la distance d’un point à une
droite.

Les élèves ont testé différentes places possibles pour le point M et ont remarqué que
la somme ME + MF + MG variait peu des longueurs 8,5 cm, 8,6 cm ou 8,7 cm…
Ils ont alors conjecturé que la somme ME + MF + MG était constante et que la place
du point M n’avait peut-être pas d’importance.

Tout ceci restait à prouver.

Les élèves ne sachant pas comment aborder cette preuve, j’ai proposé le tracé des
segments [AM], [BM] et [CM]. Ils ont reconnu les triangles MAB, MAC et MBC
ainsi que leur hauteur issue de M (en classe, sur la figure du tableau, les angles droits
étaient codés).

Il aurait sans doute été possible de faire redire aux élèves à quel moment la distance
d’un point à une droite avait été un outil utile dès la classe de cinquième. Je n’ai pas
osé, le temps court si vite…

Cette reconnaissance de trois triangles et d’une de leurs hauteurs n’a pas suffi pour
débloquer la situation. J’ai dû leur demander à quoi pouvait servir le tracé d’une
hauteur d’un triangle. Après quelques hésitations, l’aire du triangle a cependant été
évoquée.

Je leur ai donc demandé d’écrire l’aire de chacun des trois triangles MAB, MAC et
MBC. Le fait de ne pas connaître les longueurs ME, MF et MG les a perturbés,
cependant nous sommes arrivés à 5 × ME, 5 × MF et 5 × MG pour les aires des trois
triangles.

Un rappel de la conjecture proposée par les élèves a fait examiner la somme des trois
aires (la somme des distances demandée a incité à étudier la somme des trois aires)
et a amené à la conclusion que l’aire du triangle équilatéral ABC pouvait

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s’écrire
5 × (ME + MF + MG). La somme ME + MF + MG était donc de mesure égale au
cinquième de celle de l’aire du triangle ABC et
ne dépendait donc pas de la place du point M
dans le triangle.

En exprimant l’aire du triangle ABC en fonction
de sa hauteur h, nous avons pu obtenir de plus
que cette aire était aussi égale à 5 × h et donc
conclure que la somme des distances du point M
aux trois côtés du triangle équilatéral ABC était
égale à la hauteur h de ce triangle. Ce résultat a
pu être établi pendant un de mes temps de
synthèse.

Mes élèves sont bien rentrés dans la situation de recherche proposée par l’énoncé (ce
n’était pas la première qu’ils en rencontraient dans l’année), mais ils ont été très
surpris de l’utilisation d’« aire de triangles » et de « calcul algébrique » dans un
énoncé qu’ils avaient considéré de prime abord comme un exercice de constructions
et de mesurages.

Des collègues auront peut-être envie de poursuivre le questionnement à propos de
triangles équilatéraux de côté c. La classe était une classe de quatrième tout à fait
ordinaire et non un regroupement par le jeu d’options de très bons élèves. Je
reconnais n’avoir pas eu envie d’aller dans cette direction.

J’ai préféré les orienter vers les cas ou le point M était sur un côté ou un sommet du
triangle équilatéral.

Que se passe-t-il lorsque le point M est un point d’un des côtés du triangle ? Que se passe-t-il lorsque le point M est un des sommets du triangle ?

Lorsque le point M est confondu avec un des sommets du triangle équilatéral (A par
exemple), deux des distances sont nulles et le résultat est immédiat.

J’ai profité de cette situation de réussite pour leur demander le calcul d’une valeur
approchée à 1 mm près de la hauteur AH du triangle ABC. L’utilisation d’une
propriété de la hauteur d’un triangle équilatéral et du théorème de Pythagore leur a
fait comprendre que les sommes de longueurs obtenues dans la phase de recherche
n’étaient pas farfelues.

Nous allons calculer la hauteur d’un triangle équilatéral de 10 cm de côté et peut-être comprendre pourquoi « ME + MF + MG » varie peu des longueurs mesurées en début d’activité.

Après avoir calculé la longueur HC, le calcul de la longueur HA est immédiat.

Pour gagner du temps, j’ai repris la main pour leur montrer rapidement que l’étude
du cas où le point M était sur un des côtés se faisait sans problème et que le résultat
conjecturé restait valable.

Une élève a voulu savoir ce qui se passait lorsque le point M était à l’extérieur du
triangle. J’ai proposé la recherche à la classe et l’étude de quelques dessins les a
persuadés que la somme des trois distances pouvait être bien supérieure à la hauteur
du triangle… Je ne suis pas allé plus loin sur ce point et je les ai laissés sur cette
constatation visuelle.

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Pour continuer l’exploration de cette
situation, je leur ai posé la question
suivante :

Quel serait le côté (en cm) d’un triangle équilatéral dont la hauteur mesurerait 10 cm ?

En faisant un parallèle avec le calcul de la
hauteur du triangle équilatéral, le résultat
a été obtenu sans trop de difficultés.

La longueur obtenue n’est qu’une valeur approchée qui peut malgré tout être utilisée
pour le tracé d’un tel triangle.

Nous avons pris le temps d’explorer plusieurs types de construction « à la règle et au
compas » : à partir du tracé de deux droites perpendiculaires sécantes en H, le tracé
du segment [HA] et de l’angle \(\widehat{HAC}\) mesurant 30° ou le tracé de deux droites
parallèles distantes de 10 cm et d’un angle de 60° dont un côté est inclus dans une
des deux droites.

J’ai ensuite expliqué que nous allions utiliser ce qui venait d’être découvert et prouvé
pour un type particulier de représentation graphique.

Si les trois côtés d’un triangle équilatéral de hauteur 100 mm visualisent les trois critères d’un traitement de données, les distances à ces côtés peuvent indiquer les pourcentages représentant chacun de ces critères (les 100 % du total des trois pourcentages seront représentés par le total des trois distances aux côtés du triangle).

À tout point du triangle pourront correspondre les pourcentages représentant les trois
critères représentés par les trois distances aux côtés du triangle.

Voici quelques exemples de « critères » représentables :

Il existe trois méthodes pour fabriquer de l’électricité : thermique (gaz, charbon,
pétrole), renouvelable (solaire, géothermique, hydraulique, éolienne), nucléaire.
Selon les époques ou les pays, les proportions de ces trois types de production
évoluent.

Le collège de Saint-Mihiel recrute sur trois cantons : Vignelles les Hattonchâtel,
Pierrefitte sur Aire et Saint-Mihiel. Les proportions des élèves selon les années
peuvent être étudiées.

Les composants des aliments sont classés en trois grandes catégories : les lipides, les
protides et les glucides. Des pistes d’échanges peuvent être ouvertes avec des
collègues travaillant sur la nutrition (voir en annexe le tableau joint).

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Place deux points représentant des aliments comportant 0% de protides. Où sont-ils
situés ?

Place deux ponts représentant des aliments comportant autant de glucides que de
protides. Où sont ils situés ?

Existe-t-il des aliments représentés par les sommets du triangle ?

Où sont placés les points représentant les aliments comportant plus de glucides que
de protides ?

Voici l’exercice proposé à la suite en classe :

Trace un triangle équilatéral ABC de 10 cm (100 mm) de hauteur.

{} LIPIDES GLUCIDES PROTIDES
Aliment A 20% 20%
Aliment B 35 % 30 %
Aliment C 40 % 20 %

Les aliments A, B et C ont autant de lipides que de glucides. Dans le triangle tracé
précédemment, où se trouvent les points A, B et C représentant ces éléments ?

Cet exercice ne présente a priori que peu d’intérêt : il aurait été préférable de
travailler avec de vrais aliments, tels ceux de l’annexe jointe…

Contenus mathématiques rencontrés :

La présentation de l’énoncé de départ peut s’assimiler à un problème ouvert aisé à
mettre en œuvre.

Actuellement, la notion de distance d’un point à une droite est à mettre rapidement
en relation avec la notion de hauteur d’un triangle utilisée dès la classe de cinquième.

Nous appellerons aussi hauteur d’un triangle la droite permettant de trouver cette
distance d’un sommet au côté qui lui est opposé.

La formule permettant le calcul de l’aire d’un triangle est utilisée dans la
démonstration de la propriété constatée.

Le calcul du côté d’un triangle équilatéral de 10 cm de hauteur fait intervenir les
propriétés du triangle équilatéral et le théorème de Pythagore.

La réponse à la question « Où est représenté un aliment comportant autant de lipides
que de glucides et de protides ? » permet la rencontre avec le fait qu’un point de la
bissectrice d’un angle est à égale distance des côtés de l’angle.
 

 

Les tracés possibles « à la règle et au compas » d’un triangle équilatéral de 10 cm de
hauteur utilisent les propriétés du triangle équilatéral ainsi que l’écartement constant
de deux droites parallèles (les compléments des nouveaux programmes de l’école
élémentaire incitent à rencontrer ce point de vue qui est facilité par l’usage de
l’équerre rapporteur ou de toute autre équerre dont l’axe de symétrie est utilisé).

L’utilisation de pourcentages, la création et l’analyse de représentations graphiques
s’insèrent dans la partie « gestion de données » de notre enseignement. De plus, ils
sont supports d’activités touchant d’autres disciplines. Pourquoi ne pas présenter ce
type de représentation aux collègues des matières intervenant dans les thèmes de
convergence ? Ce sera l’occasion à ces matières de se mettre au service des
mathématiques en refaisant vivre cette situation riche en mathématiques.

L’année de cette expérimentation, mes élèves de quatrième bénéficiaient de quatre
heures de mathématiques hebdomadaires. Actuellement, comme presque tout le
monde, nous ne « bénéficions » plus que de trois heures et demi. Cependant, dès que
j’aurai de nouveau une classe de quatrième, au vu de la richesse des contenus
rencontrés, je continuerai à prendre deux ou trois heures pour faire vivre la situation
décrite dans cet article.

Cette idée de présenter à nos collègues des outils ou des méthodes faisant vivre de
riches mathématiques me paraît être une idée à creuser. Dans cette période
d’incitations de rencontres entre différentes matières, nous pourrions peut-être un
peu plus faire entendre notre voix…

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Notes

[1Collège « Les Avrils » 55300 SAINT MIHIEL. francois.drouin@ac-nancy-metz.fr

[2Programme Académique de Recherche et d’Innovation.

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