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Une recherche sur les polyèdres

Par des élèves du lycée Val de Seine de Grand Quevilly :
Mathieu RAT, Quentin LEROUX, Christophe TENDENG,
Enseignants : MM. AUBERT, FRAYNAY, GRIHON.
Chercheur : M. Daniel KROB, laboratoire d’Informatique de Rouen

Cet article a été rédigé par un atelier MATh.en.JEANS en 1992 et exposé lors du congrès du Palais de la Découverte.

Le but initial était de trouver une relation liant le nombre de faces (F), d’arêtes (A), et de sommets (S), d’un polyèdre quelconque.
Après une première recherche sur des assemblages de cubes, et un décompte des différentes caractéristiques (F, A, S), nous avons découvert quelques formules :

  • Assemblages faces contre faces : 2F + A − 3S = 0,
  • Assemblage arêtes contre arêtes : (7/6) F + A − 3S + 5 = 0.

Nous avons alors constaté que notre domaine de recherche était trop vaste, et nous avons décidé de fixer et de préciser nos définitions, et de nous limiter aux polyèdres convexes :
Polyèdre convexe : solide limité de toutes parts par des polygones plans, tel que tout le volume soit situé du même côté d’un plan tangent à n’importe quelle face.
Face : tout polygone plan qui limite le polyèdre.
Sommet : point de l’espace où se rencontrent au moins trois faces.
Arête : segment compris entre deux sommets, donc commun uniquement à deux faces.

Après l’étude de ces polyèdres, nous avons retrouvé la formule d’Euler :

F + S − A = 2.

Démonstration :

L’idée générale est de décomposer le polyèdre convexe en unités de base pour lesquelles la formule est admise et vérifiée (le tétraèdre). On veut alors le reconstruire autour d’un point central, commun à tous les tétraèdres obtenus.

Étapes :

  • Tout polygone peut être divisé en triangles, donc toutes les faces du polyèdre peuvent n’être constituées que de triangles : on ne change pas F + S − A car, pour chaque arête ajoutée, on ajoute une face.
  • En reliant un point du volume à tous les sommets et en explosant le polyèdre, il est possible de n’obtenir que des tétraèdres.
  • La reconstruction du volume est alors possible.

Let’s go !

On associe n tétraèdres, face contre face : on a donc (n − 1) collages.
A, F et S désignant le nombre d’arêtes, de faces et de sommets d’un tétraèdre, on a : F + S − A = 2.

A’, F’, S’ désignant le nombre d’arêtes, de faces, de sommets du polyèdre obtenu, on peut écrire : A’ = n A − 3 (n − 1).

En effet, on apporte, en associant n tétraèdres face contre face, n fois le nombre d’arêtes d’un tétraèdre, et on perd 3 à chaque collage. En raisonnant de la même manière, on obtient :

F’ = n F − 2 (n − 1)
et
S’ = n S − 3 (n − 1).

On a alors :
F’ + S’ − A’ = n F − 2 (n − 1) + n S − 3 (n − 1) – n A + 3 (n − 1).
F’ + S’ − A’ = n (F + S − A) − 2n + 2 = 2n − 2n + 2 = 2
Donc

F’ + S’ − A’ = 2.

Insertion des tétraèdres selon deux et trois faces.

Par deux faces : A, F et S désignent le nombre d’arêtes, de faces et de sommets du polyèdre sans le dernier tétraèdre. a, f et s désignent le nombre d’arêtes, de faces et de sommets du dernier tétraèdre. A’, F’ et S’ désignent le nombre d’arêtes, de faces et de sommets du polyèdre final.
En construisant, on observe :

A’ = A + a − 6 ; F’ = F + f − 4 ; S’ = S + s − 4.

Donc :

F’ + S’ − A’ = (F + f − 4) + (S + s − 4) − (A + a − 6).

Or :

F + S − A = 2

et

f + s − a = 2.

On obtient :

F’ + S’ − A’ = (F + S − A) + (f + s − a) − 2 = 2.

Donc la formule est vérifiée.
Commentaire des enseignants : on ajoute une arête, mais l’arête commune aux deux faces de recollement disparaît. Or elle disparaît parce qu’il y a quelque chose derrière, ce qui est dû à la façon dont le polyèdre peut être reconstruit, étant donné qu’il est convexe : ce serait faux avec un assemblage torique par exemple. Il ne suffit pas non plus d’avoir un assemblage « étoilé » à partir d’un sommet comme indiqué dans « Étapes », il faut vraiment utiliser la convexité.

Par trois faces : De même, on a :

A’ = A + a − 9, F’ = F + f − 6 et S’ = S + s − 5.

Et

F’ + S’ − A’ = (F + f − 6) + (S + s − 5) − (A + a − 9) = 2.

Donc :

F’ + S’ − A’ = 2.

La formule est vérifiée.

Formule d’Euler : F + S − A = 2
Quelques Polyèdres :
Faces Sommets Arêtes
Prisme triangulaire 5 6 9 irrégulier
Hexaèdre (triangles) 6 5 9 irrégulier
Heptaèdre 7 10 15 irrégulier
Octaèdre 8 6 12 irrégulier
Décaèdre (triangles) 10 7 15 irrégulier
Nonaèdre (9 faces) 9 14 21 irrégulier
Pentadécaèdre 15 12 25 irrégulier
Tétraèdre 4 4 6 régulier
Cube 6 8 12 régulier
Octaèdre 8 6 12 régulier
Dodécaèdre 12 20 30 régulier
Icosaèdre 20 12 30 régulier

Les solides de Platon
Après avoir démontré la formule d’Euler, nous nous sommes donc intéressés aux cinq polyèdres réguliers. Plus précisément, notre but était de prouver qu’il n’en existe
que cinq et de les décrire.
Mais avant tout, qu’est ce qu’un polyèdre régulier ?

  • C’est un polyèdre convexe, donc pour lequel la formule F + S − A = 2 est valable.
  • Toutes ses faces sont identiques et sont des polygones réguliers.
  • Le même nombre d’arêtes, donc de faces, arrivent à un même sommet.

La méthode de recherche fut de traduire les propriétés du polyèdre régulier sous forme d’équations en les remplaçant ensuite dans la formule d’Euler.
Puis, moyennant l’encadrement de deux inconnues, à savoir, le nombre d’arêtes par face, et le nombre de faces qui contiennent le même sommet, nous avons obtenu les cinq uniques polyèdres réguliers : le tétraèdre, le cube, l’octaèdre, le dodécaèdre et l’icosaèdre.

Le club des cinq…

Conditions :
n est le nombre de côtés de chaque faces (n > 2), alors $A={nF \over 2}$ ;
p est le nombre de faces qui contiennent le même sommet (p > 2), alors : $S={nF \over p}$ ;
A, F et S désignant le nombre d’arêtes, de faces et de sommets du polyèdre, on a : F + S – A = 2.
On peut alors écrire : $F + {n \over p}F-{n \over 2}F=2$, soit F(2p + 2nnp) = 4p.
F et p sont des éléments de $\mathbb{N}$*, donc 2p + 2nnp > 0,
donc p (2 − n) + 2n > 0 et donc : p (n − 2) < 2n.

On a alors la double inégalité suivante : $2, ce qui nous permet d’écrire, sachant que p est un entier naturel : $3\le p<{2n \over n-2}$ .
D’où : $3\le {2n \over n-2}$, puis : 3(n − 2) < 2n, soit : 3n − 6 < 2n,
donc : n < 6.

D’après les hypothèses de départ, on vient de prouver que n ne peut prendre que les valeurs strictement plus petites que 6. Les valeurs prises par n sont donc nécessairement 3, 4 ou 5.
Par un raisonnement analogue, l’écriture 2n + 2pnp étant symétrique en n et p, on obtiendrait que les seules valeurs possibles pour l’entier p sont : 3, 4 ou 5.

Nous pouvons maintenant, connaissant les valeurs à donner à n et p, déterminer les valeurs de F. On utilise l’équation :
F(2n + 2pnp) = 4p.
On peut obtenir les résultats donnés dans le tableau suivant :

Valeur donnée à n Valeur donnée à p Valeur obtenue pour F polyèdre
3 3 4 tétraèdre
3 4 8 octaèdre
3 5 2 icosaèdre
4 3 6 cube
4 4 impossible car 2n + 2p − np = 0
4 5 impossible car 2n + 2p − np < 0
5 3 12 dodécaèdre
5 4 impossible car 2n + 2p − np < 0

On retrouve bien les cinq solides de Platon.
Commentaire des enseignants : comme cela a été souligné lors des exposés oraux,
cette démonstration établit que si un polyèdre est régulier, ce ne peut être que dans cinq
cas ; il reste à vérifier que chaque cas correspond à un polyèdre régulier « existant ».

<redacteur|auteur=500>

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