L’épreuve pratique de mathématiques au bac S analyse des sujets

Préliminaire

À propos de l’épreuve pratique de mathématiques au bac S, je vous propose une analyse des sujets proposés par l’inspection générale.

Toutes les figures relatives à cet article sont téléchargeables : fichiers Geogebra.

Il peut sembler prématuré de soumettre ces descriptifs préliminaires à la critique, alors que les épreuves expérimentales auront lieu dans quelques semaines et que nous disposerons alors des sujets complets et précis, avec les instructions pour les examinateurs. Cependant j’ai voulu me placer dans la peau d’un enseignant qui prépare ses élèves à cette épreuve, et qui, ne connaissant que ces descriptifs, se demande à quelle sauce ses ouailles vont être mangées.

Je n’ai examiné en détail que les sujets nécessitant l’emploi d’un logiciel de géométrie dynamique (géométrie plane). Il y en a 9. Pour d’autres sujets, où il est question de représentations graphiques, on peut employer également ce type de logiciel, ou bien utiliser les graphiques d’un tableur, ou encore un simple traceur de courbes.

 

Sujet 002

Figure
Je l’ai effectuée en 10 min (dans le cas \(\alpha+\beta+\gamma=1\)), avec GeoGebra ; pas de difficulté particulière, il suffit de connaître les fonctionnalités de base du logiciel, mais il faut prévoir que certains élèves, peu entraînés, mettront le double de temps. Plusieurs façons de la réaliser : par coordonnées, par vecteurs…

Conjecture
Évidente et immédiate, dans un tel cas (\(\alpha+\beta+\gamma\neq 0\), et \(\alpha+\beta+\gamma\neq 1\)) : le lieu de \(M’\) est un cercle. Si \(\alpha+\beta+\gamma= 0\) : idem, et il est clair que ce cercle est déduit de \(\Gamma\) par translation. Si \(\alpha+\beta+\gamma=1\), certains élèves seront déroutés de voir \(M’\) immobile, et penseront s’être trompés.

Remarque
Pour l’élève sachant bien son cours, la figure n’est pas nécessaire, il n’en a pas besoin pour écrire \(\overrightarrow{MM’}=(\alpha+\beta+\gamma)\overrightarrow{MG}\).

Démonstration
cas général : si le sujet-élève comporte, comme ce descriptif, le mot « barycentre », le candidat moyen ne devrait pas y avoir trop de difficulté à écrire \(\overrightarrow{MM’}=(\alpha+\beta+\gamma)\overrightarrow{MG}\) montrer à partir de là que \(M’\) est l’image de \(M\) par une homothétie de centre \(G\) nécessite un petit calcul vectoriel qui va en embêter plus d’un.

Cas particuliers
idem

Conclusion
Sujet faisable mais assez difficile à faire en 1 h ; figure utile mais non indispensable.

 

Sujet 003

Figure
Même remarques que pour sujet 002. Il faut savoir faire afficher la longueur totale \(L\) = \(MA+MB+MH\)

Conjecture
Pour des dimensions du rectangle \(ABCD\) prises au hasard, on voit bien que, quand \(M\) parcourt la médiatrice, \(L\) passe par un minimum, mais exprimer la position correspondante n’a rien d’évident. Quelques rares élèves remarqueront qu’elle correspond au cas où les trois angles \(\widehat{HMA}\), \(\widehat{HMB}\) et \(\widehat{AMB}\) valent 120°.

Démonstration
On peut à la rigueur considérer comme exigible que dans un cas pareil l’élève exprime \(L\) comme fonction d’une variable (\(x\) = \(MH\), ou bien angle \(\widehat{AMB}\)), qu’il en étudie les variations pour trouver le minimum. Mais dans le cas présent espérer qu’il finira les calculs avant la fin de l’heure est totalement illusoire.

Conclusion
Situation où les TICE sont effectivement utiles ; mais mathématiquement trop difficile.

 

Sujet 012

Figure
Le sujet doit donner des précisions sur l’équerre (triangle \(ABC\) rectangle en \(B\)) : longueur des 3 côtés (ou de 2, le 3e étant à calculer par Pythagore), ou bien une longueur et mesure d’un angle aigu ; dans tous les cas on peut calculer les 3 longueurs avant de construire. J’ai pris pour exemple le « célèbre » triangle 3-4-5. On place \(C\) mobile sur \([OS)\), on trace le cercle de rayon 5 de centre \(C\), il coupe \([OM)\) en \(A\), ensuite les cercles de centres \(C\) et \(A\), de rayons 4 et 3, se coupent en \(B\). Cette construction est évidente pour nous, mais, j’en suis sûr, pas pour la majorité des élèves de Terminale S. Il y a toute une culture de la construction à la règle et au compas qui est à reconstruire (mais a-t-elle été vraiment partagée par tous dans un passé autre que mythique ?) Si on a compris le principe de la construction « à la main », l’exécution de la figure ne demande qu’une connaissance rudimentaire du logiciel. Il s’agit donc bien d’un sujet de maths, les maths interviennent dès la réalisation de la figure, l’informatique n’est qu’un outil, outil utile ici car émettre une conjecture à partir d’une figure statique ne serait pas aisé.

Conjecture
Tout dépend de quel est le point dont on cherche le lieu. J’ai testé : le point \(B\), le milieu de l’hypoténuse \([AC]\) ; le centre de gravité ; les milieux de \([AB]\) et \([AC]\). Dans les 3 derniers cas, le logiciel indique que les lieux sont des portions d’ellipses : on est hors programme, on ne peut pas demander ça. Le lieu de \(I\), milieu de \([AC]\), est un quart de cercle de centre \(O\) ; celui de \(B\) est un segment porté par une droite passant par \(O\).

Démonstrations
Celle du lieu de I est très facile : dans le triangle rectangle \(OAC\), \(OI\) = \(AC/2\) = \(Cte\) ; la limitation au quart de cercle, d’ailleurs pas plus difficile, sera la cerise sur le gâteau probablement pas exigée. Mais ceci, trop court, ne fait pas un sujet d’une heure ; d’ailleurs si on ne cherche que ce lieu, le point \(B\) est inutile, et on parlerait d’une règle \([AC]\) au lieu d’une équerre.
Démontrer que \(B\) est porté par une droite fixe se démontre par un moyen élémentaire, mais qu’il faut trouver : les triangles rectangles \(ABC\) et \(AOC\) ayant la même hypoténuse, ils ont le même cercle circonscrit. Dans ce cercle l’angle inscrit \(\widehat{COB}\) est la moitié de l’angle au centre \(\widehat{CIB}\) , or celui-ci est constant, donc la direction de \([OB)\) est constante.
Oui mais : angle inscrit/angle au centre est bien vu en 3e, mais son usage est rare en 1re/Term ; je ne pense pas que beaucoup d’aspirants bacheliers puissent trouver cette démonstration ; de plus la mention « compétence mathématiques : utiliser les lignes trigonométriques… » m’a incité à chercher une méthode trigonométrique, que je n’ai pas trouvée ; elle existe sans doute, et elle était probablement présente à l’esprit de l’auteur au moment de la rédaction ; c’est un inconvénient des « problèmes ouverts » : quand on écrit l’énoncé on oriente + ou – consciemment vers une méthode, qui n’est peut-être pas celle qui convient le mieux à un élève donné.

Conclusion
Un sujet intéressant, où l’informatique n’est pas plaquée artificiellement, elle apporte un « plus ». La difficulté mathématique dépendra fortement des points choisis, et des indications données.

 

Sujet 013

Figure
Sans problème, il suffit de trouver les commandes « droite perpendiculaire » et « lieu ».

Conjecture
Le descriptif parle d’exploiter les propriétés de la parabole, mais GeoGebra me dit que, en général, le lieu est une hyperbole, et non équilatère sauf cas particulier ; hors programme !
Exception : si la droite où se déplace \(C\) est parallèle à \((AB)\), le lieu a bien une allure parabolique. Parions donc que c’est ce cas qui sera posé.

Démonstration
On prend un repère d’origine \(O\) milieu de \([AB]\), de sorte que \(A(1, 0)\), \(B(-1, 0)\), \(C(x, k)\), \(H(x, y)\). En écrivant que le produit scalaire \(\overrightarrow{AH}.\overrightarrow{BC}\) est nul, on obtient bien \(y\) comme expression du 2nd degré en \(x\).

Conclusion
Faisable, abordable, à condition que tous soient habitués à choisir intelligemment un repère même quand l’énoncé n’en parle pas ; ce qui est effectivement une compétence à développer.

 

Sujet 026

Figure
Un peu plus compliquée que les précédentes : avec GeoGebra il suffit de savoir créer un curseur qui pilotera la valeur de \(k\), avec Cabri on peut, par exemple, définir \(k\) à partir de la distance d’un point (libre sur \((Ox)\)) à l’origine, puis définir \(\alpha\), \(\beta\), \(\gamma\), enfin construire le barycentre.

Conjecture
La forme de la trajectoire de \(G\) est évidemment très variable selon les expressions de \(\alpha\), \(\beta\), \(\gamma\) ; il est non moins évident que ces expressions seront choisies de façon à obtenir une courbe identifiable : droite, cercle, parabole…

Démonstration
Difficulté également très variable selon les expressions de \(\alpha\), \(\beta\), \(\gamma\) ; si on opte pour l’utilisation d’un repère, on obtiendra directement une représentation paramétrique du lieu, mais c’est hors programme sauf s’il s’agit d’une droite ; dans le cas général il faudra éliminer le paramètre \(k\) pour obtenir une équation \(y = f(x)\).

Conclusion
Certaine difficulté informatique ; difficulté mathématique impossible à estimer sans plus de précisions.

 

Sujet 027

Figure
Sa construction donne à réfléchir ; il ne s’agit pas de difficulté informatique, mais bien de construction géométrique, plus difficile à mon avis que dans le sujet 026. J’ai placé B à l’origine, \(C\) libre sur \((Ox)\), défini la longueur \(a\) = \(BC\), ensuite (ayant choisi 20 comme périmètre imposé) j’ai tracé les deux cercles de centres \(B\) et \(C\) et de même rayon \((20-a)/2\), ils se coupent en \(A\) ; j’ai défini la hauteur \(h\) = \(d(A, (Ox))\), enfin l’aire = \(h*a/2\).

Conjecture
Il est très facile de remarquer que lorsque l’aire est maximale, le triangle est équilatéral.

Démonstration
Exprimer \(h\), puis l’aire, en fonction de \(a\) me paraît accessible à un élève moyen, de même que l’étude des variations de la fonction obtenue, qui se conclut par l’observation d’un maximum en \(20/3\), correspondant bien à un triangle équilatéral.

Conclusion
Sujet de niveau abordable, original dans la mesure où la (petite) difficulté mathématique se situe dans la construction de la figure et non dans la démonstration.

 

Sujet 030

Figure
Pas de difficulté particulière ; le plus simple est de placer \(O\) à l’origine, \(A\) sur \((Ox)\), \(B\) sur \((Oy)\).

Conjecture
Je suppose (j’espère) que le sujet-élève donnera une indication sur la conjecture attendue concernant le cercle \(C\) ; j’en vois trois :
 son rayon est compris entre \(0\) et \(AB\)
 il passe toujours par \(H\)
 le lieu de son centre \(I\) est un cercle passant par \(O\) et par \(H\), projeté de \(O\) sur \((AB)\)

Démonstrations
 la 1re est immédiate : par projection orthogonale, \(A’B’\) \(\leqslant\) \(AB\), et il y a égalité quand \(d\) est parallèle à \((AB)\) ; le minimum \(0\) est atteint quand \(d\) \(\bot\) \((AB)\), alors \(A’\), \(B’\), \(I\) et \(H\) sont confondus.
 j’ai essayé de démontrer la 2e par les similitudes, comme suggéré par le texte ; je n’y suis pas parvenu, ce qui ne veut pas dire que ce soit impossible, mais montre tout de même que ce n’est pas à la portée de tous les élèves ; j’ai trouvé une démonstration utilisant (comme dans le sujet 012) les angles inscrits :
Les triangles \(BHO\) et \(BB’O\) étant rectangles et ayant la même hypoténuse, ils ont le même cercle circonscrit \(C_1\), de diamètre \([OB]\) (Rq : \(C_1\)) ; dans ce cercle, \(\widehat{BOH}=\widehat{BB’H}\) (angles inscrits interceptant le même arc), et donc \(\widehat{HB’A’}=\frac{\pi}{2}-\widehat{BOH}\) (1)
De même \(H\) et \(A’\) sont sur un même cercle \(C_2\) (lieu de \(A’\)) de diamètre \([OA]\), dans ce cercle \(\widehat{HA’O}=\widehat{HAO}\) ; \(\widehat{HA’O}=\widehat{HA’B’}\) ; donc \(\widehat{HA’B’}+\widehat{HB’A’}=\widehat{HAO}+\frac{\pi}{2}-\widehat{BOH}\) ; mais \(\widehat{BOH}=\widehat{HAO}\) car \(BHO\) et \(HOA\) sont semblables (propriété classique des triangles rectangles) ; d’où \(\widehat{HA’B}+\widehat{HB’A’}\) = \(\frac{\pi}{2}\) ; donc le triangle \(HB’A’\) est rectangle en \(H\), donc \(H\) est sur le cercle de diamètre \([A’B’]\). CQFD
 De l’égalité (1) on déduit \(\widehat{HB’A’}=\widehat{OBH}\) , donc HB’A’ est semblable à OBH (et à OHA, et à AOB) ; l’angle \(\widehat{HA’B’}\) est donc constant, et il en est de même de l’angle \(\widehat{HIB’}\) (angle au centre qui lui correspond, dans le cercle \(C\)) ; d’où la preuve de la 3e conjecture : le lieu de \(I\) est le cercle d’où l’on voit \([OH]\) sous l’angle \(2\widehat{OAB}\).

Conclusion
Sujet intéressant, mais dont la version élève devra comporter des indications précises sur les résultats attendus, et sur les méthodes de démonstration.

 

Sujet 031

Figure
Avec GeoGebra, c’est facile : on crée la parabole P en tapant dans la zone de saisie \(y=x^2\) (par exemple) ; on place un point \(A\) sur la parabole ; si on suppose, par exemple, que la relation entre les abscisses est \(x(B) = x(A) + 2\), on tape \(x=x(A)+2\), il apparaît une droite parallèle à \((Oy)\), le point \(B\) est son intersection avec la parabole. On dispose alors de l’outil « tangente » : on clique sur \(A\), puis sur la parabole, la tangente apparaît ; idem pour \(B\) ; on place \(M\) à l’intersection des deux tangentes, on active sa trace, et le tour est joué.
Par contre la construction avec Cabri 2 plus m’a semblé devoir être beaucoup plus laborieuse ; il est vrai que je ne suis plus très familier de ce logiciel.

Conjectures
Il apparaît clairement que : avec \(x(B) = x(A) + 2\), le lieu de \(M\) est une parabole image de \(P\) par une translation de direction \((Oy)\) ; avec \(x(B) = 2x(A)\), c’est une parabole de même sommet et de même axe que \(P\) ; on peut évidemment varier les expressions à l’infini, mais on peut penser qu’elles resteront telles que le lieu soit reconnaissable.

Démonstration
Dans le cas \(x(B) = x(A) + k\), elle paraît être faisable par le candidat lambda : écrire les équations des deux tangentes, chercher leur intersection, exprimer \(y(M)\) en fonction de \(x(M)\), on trouve bien une expression du second degré.

Conclusion
Sujet convenable si le logiciel utilisé y est adapté, et si la relation entre les abscisses est assez simple ; mathématiquement sans difficulté excessive.

 

Sujet 047

Figure
Sans aucune difficulté, quel que soit le logiciel, on place \(M\) mobile sur \([BC]\), la perpendiculaire en \(M\) à \((BC)\), on fait afficher les aires des deux polygones.

Conjecture
En déplaçant \(M\), on voit qu’en une certaine position, les deux aires sont égales. Mais avait-on vraiment besoin d’une figure dynamique pour faire ce constat ?

Démonstration
L’existence et l’unicité sont des conséquences immédiates du théorème des valeurs intermédiaires ; on pourra être exigeant sur la rigueur de la rédaction.
Demandera-t-on une résolution numérique ? C’est envisageable ; il faudra décomposer celui des deux polygones qui est un quadrilatère en un trapèze et un triangle ; exprimer \(MN\), puis les aires en fonction de \(x=BM\) : ça devrait être exigible en lycée, mais je suis hélas certain qu’une partie appréciable des candidats aura besoin d’aide. Au moins sauront-ils finir les calculs (équation du second degré).

Conclusion
Un sujet où le recours au logiciel n’est pas indispensable et paraît « parachuté ». Un petit problème mathématique assez intéressant.

 

Conclusion générale

Dans aucun de ces sujets, sauf un (sujet 026), la construction de la figure n’offre de difficulté dès que l’on connaît le b-a-ba d’un logiciel, et le temps passé à la construire représentera une petite partie de l’heure. Dans ce sens on peut donc dire qu’ils évitent l’écueil de l’épreuve centrée sur l’informatique.

Dans au moins 7 (sur 9) d’entre eux, la figure dynamique est réellement utile, et permet des conjectures qui n’apparaissent pas sur un dessin statique.

Mais dans une majorité d’entre eux la démonstration mathématique est nettement trop difficile pour être faite sans indication ; par conséquent : ou bien le sujet définitif (fiche-élève) donnera des indications précises, et il perdra son caractère de question ouverte, à prise d’initiative ; ou bien, dans la notation, on sera amené à sur-valoriser des connaissances informatiques rudimentaires, et il prêtera le flanc à la critique de ceux qui craignent une épreuve d’informatique et non de maths.

Une lecture plus rapide mais néanmoins attentive de certains autres sujets (portant sur les suites par exemple) me fait penser que l’excès de difficulté mathématique est général.

 

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