Bulletin Vert n°495
septembre — octobre 2011

Éditorial du Bulletin 495

Un millésime exceptionnel …

J’ai demandé souvent à des vins capiteux
D’endormir pour un jour la terreur qui me mine ;
Le vin rend l’œil plus clair et l’oreille plus fine !

Charles BAUDELAIRE, La fontaine de sang

Avec une terre de Graves arrosée au bon moment par les pluies nocturnes, des rayons de soleil à la chaleur douce et enveloppante mais qui ne brûle pas, le millésime 2011 apparaît véritablement exceptionnel. Je veux bien sûr parler de l’appellation Pessac-Léognan dont les grappes finissent de se colorer au soleil de la fin d’été et qui s’avère très prometteur.

En revanche, on ne peut pas en dire autant du cru 2011 du Château Education nationale, dont l’œnologue n’a vraisemblablement pas compris les principes de vinification. Dans une interview donnée au Parisien le 21 juillet 2011, le ministre de l’Éducation nationale Luc Chatel se réjouit en effet de l’augmentation du nombre d’inscrits à la session 2012 du CAPES de mathématiques : « De manière générale, les matières scientifiques et les mathématiques en particulier ont du mal à séduire depuis quelques années. Pourtant dans cette dernière discipline, le nombre de candidats vient de faire un bond de 20%. Il n’y a donc pas de fatalité  ». Après une campagne médiatique qui présentait un recrutement « massif » de 17 000 personnes (après 34 000 départs en retraite), les artifices de communication ministériels continuent. Comment peut-on faire croire que les choses commencent à s’arranger alors qu’elles se dégradent depuis plusieurs années ? Il faut rappeler en effet que si le nombre d’inscrits aux concours externes du second degré (toutes disciplines) est en hausse d’environ 7% pour la session 2012 (site officiel), cela ne représente qu’un peu moins de 70 000 candidats alors qu’il y en avait plus de 100 000 en 2007. Pour ce qui concerne les mathématiques, le CAPES 2011 affichait 950 postes à pourvoir.

Les 1300 admissibles n’ont pu fournir que 574 admis. Belle gestion programmée des recrutements ! L’augmentation affichée par le ministre pour la session 2012 arrive donc après une chute effrayante du nombre de candidats au concours depuis trois ans.

Les sciences ont du mal à séduire ? Sûrement pas. Alors fatalité ?

Nous ne disons pas que c’est une fatalité, mais plutôt le résultat d’une politique où l’enseignement des sciences et des mathématiques en particulier a été malmené depuis maintenant plusieurs années. Non Monsieur le ministre, ce ne sont pas les sciences qui ne séduisent pas, mais la manière dont elles sont actuellement enseignées, dans un lycée qui ne leur laisse qu’une place congrue et un temps réduit jusque dans la série scientifique ; dans des universités aux formations de Masters très disparates qui ne trouvent pas leurs marques et ont du mal à faire le plein d’étudiants effrayés à juste titre par les conditions d’entrée dans le métier d’enseignant. Le résultat pour la session 2011 est là, sous nos yeux interloqués, avec des dysfonctionnements inacceptables et des résultats inquiétants pour l’avenir.

Alors que faire ?

L’année même où le CAPES ressemble plus à un examen qu’à un concours, apparait un rapport d’une mission d’information de l’Assemblée nationale dirigée par le député UMP Jacques Grosperrin qui ne demande pas moins que la suppression des concours de recrutement des enseignants. Même si ce rapport a été rejeté par la Commission de l’Assemblée nationale, on ne peut qu’être inquiets d’un avenir que l’on nous accuse pourtant rapidement de « lire dans le marc de café » lorsque nous dénonçons à l’avance ce qu’on peut constater quelques mois plus tard. Cela a été vrai pour la réforme du lycée dont nous disions dès le début qu’elle serait source d’inégalités entre les élèves et les établissements (une seconde enquête est en ligne sur www.apmep.fr sur la mise en place des classes de Première).

Cela s’avère exact également pour le recrutement des enseignants dont nous dénonçons les effets néfastes de la réforme des concours et de l’année de stage. Nous sommes donc d’accord avec un seul point de la déclaration du ministre : rien n’est inéluctable. Nous allons collectivement le lui prouver, en nous mobilisant cette année pour que de telles gabegies s’arrêtent enfin et qu’une véritable réforme soit réfléchie, concertée et lancée à tous les niveaux d’enseignement, avec un autre centre d’intérêt que le seul souci d’économie et de restriction du service public d’éducation.

Il s’agit bien là d’une question d’idéologie que nous ne devons pas avoir peur de revendiquer.

L’idéologie d’une éducation nationale financée par l’Etat. L’idéologie du savoir-faire d’enseignants fonctionnaires dont le recrutement par concours garantit l’indépendance à toutes formes de pressions et de manipulations.

Faisons en sorte cette fois que tous les millésimes 2012 soient exceptionnels.

Tchin !

 

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