Bulletin Vert n°510
septembre — octobre 2014

Multiversalité du temps, du calendrier et du zéro maya

par André Cauty

Supplément au n° 36 de la revue Amerindia
éditée par l’Association d’Ethnolinguistique Amérindienne, 2013.
234 pages en 14,5 × 20,5, ISSN : 0221-8852

 

Ce travail de recherche dépasse le cadre habituel des article d’Amerindia pour s’introduire aussi dans celui de l’Histoire des mathématiques, dont il aborde un chapitre peu connu, sans doute parce qu’il concerne des peuples dont le développement mathématique n’a eu aucune interaction avec celui de la civilisation européenne, pendant des millénaires.

Pour les Mayas, le nombre était essentiellement un outil pour mesurer le temps. Pour ce faire ils devaient tenir compte d’une part de phénomènes naturels, tels l’année solaire mais aussi les cycles lunaires et vénusiens, d’autre part de nombreuses fêtes religieuses : le calendrier est un outil de pouvoir pour les scribes, les devins et les rois. D’où l’intrication de nombreux cycles, et l’émergence d’une grande expertise en arithmétique modulaire : les additions et soustractions modulo n, que n vaille 13, 20, 260, 365, ou même 18980, n’avaient pas de secret pour eux, ainsi que le PPCM et les tables de multiples. Ils pratiquaient une opération particulière, appelée « protraction » ; ils comptaient en base vingt. Sans contact avec l’Inde, ils ont aussi inventé le zéro, et même deux zéros : l’un ordinal, l’autre cardinal ; ainsi que la numération de position. Ils avaient aussi créé le Compte Long, ou décompte des jours depuis une origine mythique remontant à plusieurs milliers d’années, et écrivaient systématiquement les dates sous la forme d’une égalité entre le Compte Long et la date dans deux calendriers cycliques, l’un de 13 × 20 = 260 jours, l’autre de 18 × 20 + 5 = 365 jours. La redondance de ces données permet de vérifier que les scribes ne commettaient pratiquement jamais d’erreur. L’auteur souligne la supériorité mathématique des Mayas par rapport aux Aztèques.

L’ouvrage est composé de :

  • Préface de Jean-Michel Hoppan.
  • Avant-propos
  • Partie 1 : Intelligence du zéro
  • Partie 2 : Faits établis, questions débattues : temps et calendrier
  • Partie 3 :Traduire les dates, corréler les calendriers
  • Références
  • Conventions et abréviations

Le texte, exempt de jargonnement spécialisé, est accessible au commun des mortels ; les illustrations, souvent en couleurs, sont d’une grande beauté. Néanmoins il ne s’agit pas d’une lecture facile, pour au moins trois raisons :

  • d’abord la densité de la mise en page : petits caractères, pas de changement de page en début de chapitre…
  • ensuite la surabondance d’abréviations, qui oblige à consulter très fréquemment le répertoire en fin d’ouvrage, où d’ailleurs on ne les trouve pas toutes.
  • enfin la construction elle-même, qui donne souvent une impression de redites (ce qui n’est pas forcément négatif et peut même avoir des vertus pédagogiques).

L’auteur, épris de rigueur, utilise volontiers le vocabulaire mathématique (isomorphisme, théorème, …). Il fait des parallèles pertinents avec les mathématiques européennes. Mais plus d’une fois j’ai pensé qu’il aurait pu s’exprimer plus clairement. Ce texte, fouillé et érudit dans un domaine qui n’est pas le nôtre, ne vise sans doute pas en priorité un lectorat tel que celui du Bulletin Vert ; néanmoins l’amateur d’Histoire des mathématiques trouvera ici des connaissances précieuses et rares, et aussi des idées d’activités interdisciplinaires « exotiques », connectées avec le cours d’arithmétique.

C’est enfin une occasion d’émerveillement et de réflexion profonde à propos de la pensée humaine, qui, dans deux espaces-temps sans intersection (Europe et Amérique précolombienne) a abouti à des résultats différents mais néanmoins convergents.

 

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