Une analyse du sujet de bac S France — 2007

bac S 2007
analyse du sujet

Exercice 1 ( 3 points)

Il s’agit de géométrie analytique dans l’espace.

Deux plans sont donnés par des équations cartésiennes. On demande dans la première question de prouver qu’ils sont perpendiculaires.

Le terme de « plans perpendiculaires » ne figure dans aucun des programmes de lycée. Il est clairement exclu du programme de seconde, qui se restreint à « droite perpendiculaire à un plan », (qui conduit en terminale à l’écriture d’équations de plan par utilisation d’un vecteur normal), et dans les classes suivantes… il est oublié.

Cet exercice, de fait, ajoute au programme officiel une compétence nouvelle : « prouver que deux plans sont perpendiculaires à partir de deux équations cartésiennes », s’appuyant, forcément, sur la définition de l’expression « plans perpendiculaires ».

Dans la deuxième question, on demande de démontrer qu’une droite \(D\), donnée par son équation paramétrique, est la droite d’intersection des plans en question. Beaucoup d’élèves ont fait une simple vérification, en reportant dans les équations de plans les expressions paramétriques des coordonnées d’un point courant de la droite. D’autres ont recalculé une équation paramétrique de cette intersection, en menant les calculs de façon à retrouver les équations proposées ; quelques-uns enfin ont cherché les coordonnées de deux points de la droite et ont vérifié qu’ils appartenaient aux deux plans.

Les compétences utilisées sont alors variées, il s’agit de « vérifier qu’une droite donnée par son équation paramétrique est incluse dans un plan d’équation cartésienne donnée » ou, travail plus complexe : « chercher des équations paramétriques de la droite d’intersection de deux plans donnés par des équations cartésiennes. »

La troisième question demande de calculer les distances à chacun des deux plans d’un point A donné par ses coordonnées. Il s’agit simplement d’appliquer deux fois de suite une formule standard. Encore faut-il la connaître… ou avoir pensé à la copier dans sa calculatrice ? Le statut des « pompes électroniques » reste une question qui n’a été tranchée rigoureusement qu’une seule fois, en 1999, par un tribunal de Rennes dont manifestement la décision n’a pas encore fait jurisprudence.

La dernière question demande de déduire des résultats précédents la distance du point \(A\) à la droite \(D\), sans autre commentaire. Les consignes de correction n’ont pas réclamé de justification détaillée de l’utilisation du théorème de Pythagore, et la plupart des élèves ont au mieux produit un schéma montrant qu’ils avaient une bonne vision de la situation. On aurait pu réclamer un peu plus de rigueur tout en facilitant la tâche des élèves si l’on avait introduit les projetés orthogonaux \(H\) et \(H’\) du point \(A\) sur les deux plans, demandé de prouver que le plan \((AHH’)\) est perpendiculaire à la droite \(D\) qu’il coupe en \(K\), et interrogé sur la nature du quadrilatère \(AHKH’\). On aurait évité des formules aberrantes (somme ou moyenne des distances calculées en 3) tout en incitant à une réflexion plus approfondie sur la situation proposée. Mais n’oublions pas que l’exercice n’est noté que sur 3 points…

Beaucoup de correcteurs ont cependant regretté le flou des solutions apportées, même dans les meilleures copies. En fait, la compétence évaluée a été ici la vision dans l’espace : elle était indispensable pour conduire à utiliser le théorème de Pythagore, et suffisait à résoudre la question puisque la démonstration précise n’était pas réclamée. Passons sur les inévitables erreurs de calcul numérique que l’utilisation de la calculatrice ne suffit pas à bannir !

 

Exercice 2 ( 3 points)

Cet exercice commence par une ROC (restitution organisée de connaissances) demandant de démontrer la formule de l’intégration par parties à partir, était-il précisé, de la formule de dérivation d’un produit. L’exercice était fort simple, dans la mesure où les subtilités sur les conditions de continuité ou les incorrections de notation n’étaient guère sanctionnées dans la notation. Il suffisait d’écrire la formule de dérivation du produit, d’intégrer les deux membres entre \(a\) et \(b\), et, après avoir utilisé la linéarité de l’intégrale, de retrouver par soustraction la formule de l’intégration par parties.

Cette question de cours était très abordable et a été nettement mieux réussie que lors des épreuves des années précédentes.

La deuxième question demande le calcul de deux intégrales classiques :

$$I=\int_0^{\pi}e^x\sin x\,dx,\ \text{et}\ J=\int_0^{\pi}e^x\cos x\,dx.$$

Il demande d’abord de vérifier deux relations : \(I=-J\) et \(I=J+e^{\pi}+1\), puis d’en déduire \(I\) et \(J\).

Un bon point pour cet énoncé très astucieux. Tout en aiguillant par la première question vers l’intégration par parties, il reste ouvert à toutes les méthodes : c’est sans risque, car dés qu’on calcule une intégration par parties, soit \(I\), soit \(J\), et quel que soit le choix de la fonction à dériver, on obtient facilement au moins une des deux relations. La deuxième apparaît alors forcément comme une variante de la première. La méthode employée permet ainsi une liberté d’initiative peu risquée, très bienvenue un jour d’examen. Les solutions ont été en effet variées et intéressantes : par exemple, certains élèves n’ont pas suivi l’énoncé, mais ont reconnu dans \(I + J\) et dans \(I-J\) des intégrales de dérivées d’un produit qui les ont conduit au résultat très simplement. Ils ont vérifié a posteriori… pour rien… les égalités proposées !

Notons que l’écart entre les « spécialistes » et les « non-spécialistes » est ici important, plus que dans l’exercice 1, même si le programme de spécialité ne contient pas d’analyse.

 

Exercice 3 pour non spécialistes ( 5 points)

L’exercice comporte deux parties.

Dans la première partie, on résout une équation de degré 3 à coefficients complexes : la première question demande de vérifier que \(i\) est solution, le calcul y conduit très naturellement, sans qu’il soit même utile de connaître les puissances de \(i\). La seule compétence indispensable relève du calcul algébrique de base : développer et réduire un produit.

La deuxième question demande de « déterminer les nombres réels \(a\), \(b\), \(c\) » pour que le polynôme donné s’écrive \((z-i)(az^2+bz+c)\).

Consternation des équipes chargées du barème : la division des polynômes n’est plus au programme, elle est travaillée dans certaines classes, mais mise à l’écart dans d’autres : il y a déjà tant à faire !

C’est un deuxième exemple dans ce sujet d’utilisation de savoirs-faire qui ne sont nulle part inscrits au programme. Certes, il n’est nul besoin pour trouver \(a\), \(b\), \(c\), d’invoquer le théorème désormais hors programme sur l’unicité des coefficients d’un polynôme. Il suffit de développer le produit et de constater que des fonctions polynômes de mêmes coefficients sont égales.

Mais la présence à l’examen d’un sujet aussi sensible est franchement malheureuse d’autant plus que la réussite de cette factorisation commande celle de la troisième question qui demande de terminer la résolution de l’équation.

Et à quoi sert cette malheureuse équation ? À rien. Il s’agit d’un pur exercice de style tout à fait dans l’esprit de ce qu’on nous déconseille absolument : du calcul pour le calcul.

La deuxième partie introduit trois points qui relient artificiellement les deux parties : leurs affixes sont bien sûr les solutions de l’équation précédente.

On demande aux candidats de trouver l’image d’un point par une rotation, puis de prouver que trois points sont alignés, enfin, de déterminer l’écriture complexe d’une homothétie définie par son centre, et par la donnée d’un point et de son image.

Les compétences évaluées ici sont « intéressantes », mais l’ensemble n’a ni queue ni tête, on ne résout aucun problème, on calcule seulement pour montrer qu’on sait calculer.

Une suite de quelques questions indépendantes, ou un Vrai/Faux à justifier aurait été ici d’un affichage plus clair puisque l’objectif est seulement ici l’évaluation de quelques savoir-faire calculatoires de base. Cette forme de faux problème sans aucun enjeu devrait être proscrite car elle donne à voir une bien mauvaise image des mathématiques : faire des mathématiques, ce n’est pas calculer dans le vide, c’est d’abord résoudre des problèmes, gardons le en tête.

 

Exercice 3 pour spécialistes ( 5 points)

L’exercice de spécialité a le même défaut, encore accentué par la situation choisie : on part d’un triangle \(ABC\) inscrit dans un cercle, les points \(A\), \(B\), \(C\) et le centre \(F\) du cercle étant donnés par leurs affixes.

La première question demande d’écrire l’expression d’une similitude directe définie par son centre et par l’image d’un point donné. Elle ne sera pas utilisée par la suite, c’est encore un calcul pour rien : résolution d’un système d’équations très classique.

La deuxième question demande de trouver l’expression d’une similitude indirecte ayant deux points invariants fixés. Deuxième système d’équations. On demande alors la nature de cette transformation : c’est une symétrie orthogonale ayant pour axe un des côtés du triangle. Celui qui l’a oublié sera mis sur la piste par la question suivante : on y demande de trouver l’affixe du symétrique d’un point par rapport à cet axe, puis de vérifier qu’il est sur le cercle circonscrit au triangle. Encore des calculs : image d’un point par une similitude, calculs de distances.

Il s’agit en réalité de vérifier sur un exemple que le symétrique de l’orthocentre par rapport à un côté du triangle appartient au cercle circonscrit, mais cela, le candidat ne le saura jamais. Il ignorera jusqu’au bout du problème que le point \(H\) qu’il manipule est l’orthocentre du triangle, et il est mené en aveugle dans un labyrinthe de calculs qui n’ont aucun sens pour lui !

La troisième question est du même acabit : on y demande de trouver l’affixe du point \(G\), image du milieu de \([AC]\) par l’homothétie de centre \(B\) et de rapport \(\frac{2}{3}\), puis de vérifier l’alignement des points \(F\), \(G\), \(H\). Même si quelques uns ont reconnu le centre de gravité, les candidats, dans leur immense majorité, ne sauront jamais qu’ils ont travaillé sur la droite d’Euler.

C’était ici encore, une suite fastidieuse de calculs non motivés, la version mathématique du problème étant réservée à l’auteur de l’énoncé et au correcteur, s’il voulait bien regarder un peu plus loin que le bout de son nez. L’exercice des non-spécialistes était dénué de sens, ici, c’est pire, le sens est bien là, mais il est caché aux élèves comme une chose honteuse !

Serait-ce le prix à payer pour des énoncés bâtis sur l’évaluation de compétences précises ? C’est un prix trop cher s’il doit conduire à des mathématiques stupides qui tournent à vide. On peut certainement faire des mathématiques intelligentes tout en fondant l’évaluation sur la reconnaissance de compétences. Les brochures 150 et 154 de l’APMEP « pour un enseignement problématisé des mathématiques au lycée » en apportent la preuve.

La situation étudiée ici était riche et aurait du conduire à un énoncé autrement plus intéressant, même dans le cadre de l’examen. Ne méprisons pas les élèves !

 

Exercice 4 ( 4 points)

Le quatrième exercice est un QCM de quatre questions, notées sans point négatif, qui porte sur les probabilités.

La première question est un exemple en situation d’utilisation de la loi binomiale, la deuxième demande dans un contexte simple l’application de la formule des probabilités totales, la troisième, qui reprend la même situation, est un exemple classique « d’inversion d’arbre », la dernière, et la plus mal réussie, demande de trouver une probabilité à partir d’une partition en trois évènements dont les probabilités sont proportionnelles aux aires de zones limitées par des cercles concentriques sur une cible.

Il y a quatre propositions de réponse par question, ce qui limite à un point l’espérance en cas de réponse au hasard. C’est un progrès certain par rapport au vrai/faux de 2006 nettement scandaleux ! En moyenne, l’exercice est le mieux réussi des cinq à la fois parmi les spécialistes et parmi les non-spécialistes, et l’avantage apporté par l’évaluation sans point négatif y est certainement pour quelque chose, mais il apparaît limité. La pénalisation des réponses fausses est une mesure sévère qui conduit facilement à des résultats désastreux, nous en avons tous fait l’expérience dans nos classes : elle est à manier avec circonspection… et tant que la notation globale n’est jamais négative, l’espérance ne peut, de toutes façons, se réduire à zéro. La bonne façon de la réduire paraît être plutôt d’augmenter le nombre des distracteurs : ne pourrait-on pas par exemple proposer 5 réponses ?

On peut bien sûr regretter l’absence de justification, et bien des correcteurs l’ont exprimé mais l’ensemble de l’épreuve, qui comportait cinq exercices était copieux, et on devine à la correction que certains candidats ont été bousculés par le manque de temps. Cet exercice a l’avantage de passer en revue rapidement un éventail intéressant de situations classiques, au cœur du programme de Terminale.

L’inconvénient majeur de ce type de travail réside surtout dans la facilité de copiage : il suffit d’une communication très minime entre candidats pour échanger une information complète, et bien des correcteurs se sont trouvés une fois ou l’autre dans la désagréable obligation de donner 4 points à des QCM exacts au milieu d’une copie de niveau très faible par ailleurs ! C’est ce point-là surtout qui nous fait réclamer des justifications, car il remet sérieusement en cause la validité de l’évaluation.

 

Exercice 5 (5 points)

Le dernier exercice est un classique problème d’analyse. C’est, en modèle réduit, le problème de bac standard des années 90. Étude d’une fonction dans une première partie, puis étude d’une suite récurrente construite à l’aide de cette fonction.

Dans la partie A, on demande de calculer, sans la fournir, la dérivée d’une fonction \(f\). L’avantage apporté aux heureux possesseurs d’une calculatrice à calcul formel est patent. Même s’ils ont détaillé la dérivation du quotient, la machine leur offrait le résultat que les autres n’avaient pas. La deuxième question demandait de prouver que le numérateur de cette dérivée définissait une fonction croissante et nulle en zéro, ce qui permettait d’en déduire le signe, et les variations de \(f\). Notons que nombre de candidats ont parlé ici de la somme de deux fonctions croissantes et évité ainsi le calcul de dérivée. Bravo !

Enfin, la troisième question étudiait la position de la représentation graphique par rapport à la droite d’équation \(y = x\), et faisait trouver leur point d’intersection.

L’étude se réduisait ainsi aux seuls éléments utiles à l’étude de la suite récurrente, et n’était pas polluée par des calculs inutiles de limites ou d’asymptotes. On peut saluer cette concision.

La partie B, classiquement, faisait d’abord démontrer que l’image par \(f\) du segment \([0, 4]\) est incluse dans \([0, 4]\) : pas de difficulté, on utilise pour le faire les variations de \(f\) étudiées en \(A\). La deuxième question est consacrée à l’étude de la suite : elle demande d’abord de dessiner sur un graphique prévu à cet effet la représentation en escalier des premiers termes, (on aurait aimé qu’il soit utilisé pour rédiger quelque conjecture sur le comportement de la suite, mais il restera inexploité…). Puis, on demande, sans mentionner le terme de récurrence, de prouver que la suite est incluse dans le segment \([0, 4]\), qu’elle est décroissante (et l’étude de la position de la courbe par rapport à la droite d’équation \(y=x\) trouve ici sa justification), enfin qu’elle est convergente.

La dernière question demande de trouver la limite de la suite. Les élèves savent en général que c’est l’abscisse du point d’intersection de la courbe avec la droite d’équation \(y = x\), mais les démonstrations correctes sont rares, même dans les bonnes copies. Heureusement, c’est la dernière question du dernier exercice, et le correcteur est devenu indulgent !

Tout ce travail n’est pas, comme à l’ordinaire guidé pas à pas. L’énoncé reste concis : il permet de mettre à l’épreuve l’expérience et la capacité d’initiative des élèves dans une situation classique mais qui demeure complexe. Cet exercice démontre à quel point il est important de travailler sérieusement certaines classes de problèmes. Seuls, les élèves qui ont pu le faire sont capables de se tirer d’affaire ici. Mais c’est un travail de longue haleine qui réclame du temps et qui n’a sans doute pu être mené partout, car dans l’état de pénurie actuel, les professeurs n’ont pas le temps d’approfondir tous les sujets, et sont obligés de faire des choix. Comment faire les bons ?

La notation est ici délicate. On a choisi de donner peu de points pour un exercice qui demandait une bonne maîtrise d’un chapitre central mais difficile du programme, de l’expérience, des qualités de logique et une capacité d’initiative non négligeables. Certes, on limite ainsi les dégâts, et on peut argumenter qu’il était placé à dessein à la fin de l’épreuve mais bien des correcteurs ont regretté qu’il soit si peu valorisé !

 

Conclusion

Que dire en conclusion du cru 2007 de l’épreuve de mathématiques de ce bac S ? L’APMEP avait demandé des épreuves testant le cœur du programme, elle a été entendue. L’épreuve teste un large éventail de compétences de base et s’en tient à des situations classiques qui n’ont pas désarçonné les candidats.

Notre critique porte surtout sur les deux exercices 3 qui sont une suite de calculs dénués de sens : l’usage des nombres complexes pour traiter de géométrie mérite certainement mieux que cela !

 

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