A propos de « Stratégie mathématiques » Des mesures bienvenues

Bernard Egger et le bureau de l’APMEP

Depuis début décembre, de nombreuses voix de la communauté mathématique ont exprimé leur satisfaction devant le texte proposé par la ministre de l’éducation nationale, Najat Vallaud-Belkacem, concernant une « stratégie mathématiques ».

Il est vrai que ce texte nous ressemble. Et l’on peut penser que les nombreuses rencontres que les conseillers du ministre ont eues avec divers représentants de la communauté mathématique sous l’égide de la CFEM ne sont pas étrangères à la prise en compte de certaines revendications importantes.

Comment ne pas se féliciter quand des fonctions essentielles des mathématiques sont soulignées : structurer la pensée, développer l’imagination, la rigueur, la précision et le goût pour le raisonnement.
Cela nous change du discours maintes fois entendu sur la sélection exagérée et injustifiée exercée par les mathématiques, qui a par exemple légitimé la suppression récente des mathématiques dans la série littéraire. Nous sommes témoins de la situation difficile des futurs professeurs des écoles qui ont été privés d’une formation suffisante en mathématiques.

Évidemment, nous préférons les propos actuels à ceux d’un passé assez récent.

Ce plan se veut une réponse à des problèmes que nous connaissons : difficultés de recrutement des futurs enseignants de mathématiques, mais déjà plus en amont, difficultés à attirer des étudiants dans les filières scientifiques au-delà du baccalauréat ; déclin des compétences en mathématiques à l’école et au collège avec pour point d’orgue une forte corrélation entre les résultats et le milieu d’origine. Comme cela est dit clairement : la situation appelle un sursaut, il y a une véritable nécessité à agir.

La prise en compte affirmée des recherches et innovations pédagogiques ne peut que nous satisfaire. Beaucoup de collègues proposent « dans leur coin » de nouvelles démarches, d’autres façons d’enseigner, mais ils le font souvent sans reconnaissance, ce qui est particulièrement décourageant. Si l’institution leur donne déjà les moyens de faire connaître leurs travaux (par exemple, par l’intermédiaire du grand portail des mathématiques annoncé dans les dix mesures de « stratégie mathématiques »), un grand pas sera franchi. Les IREM, maintes fois cités dans ce plan, pourraient avoir aussi comme mission de repérer ces actions innovantes, de les diffuser et de les soutenir.

L’évocation de la dimension ludique des mathématiques marque un vrai changement de discours et d’analyse. La place du jeu dans l’enseignement est enfin reconnue. Il y a longtemps que nous militons au sein de l’APMEP pour une telle reconnaissance. Notre groupe « Jeux », récompensé cette année par la SMF pour son apport pédagogique, y trouvera une légitimité renforcée.

Néanmoins, derrière les intentions affichées, il faut une vraie volonté politique pour les mettre en œuvre. Changer la manière d’enseigner n’est pas une mince affaire. Les formations initiale et continue joueront un rôle prépondérant. Utiliser par exemple le jeu comme outil de développement de compétences sur le raisonnement ne va pas de soi. Les professeurs de mathématiques ont rarement été formés à ce type de démarche. Il va falloir leur apporter les éléments nécessaires à sa mise en place dans un univers pédagogique. De la même façon, si le numérique quitte la salle informatique, que les élèves fréquentent habituellement une heure ou deux par semaine, pour s’installer en permanence dans la salle de cours, il faudra accompagner les enseignants dans cette nouvelle approche de la transmission du savoir.
Notre future plateforme d’accompagnement pédagogique (PAP) s’inscrit pleinement dans ces changements de pratiques.

Comme le rappelait Jean-Pierre Kahane dans de récentes réflexions que l’on trouvera sur le site de la CFEM, ce n’est pas la première fois que l’on annonce un plan pour les mathématiques. Du temps de Claude Allègre, des propositions audacieuses avaient été avancées. Il n’en est pas resté grand-chose. La volonté politique est indispensable. Bien entendu, c’est déjà en termes de moyens que l’on pourra la juger. Mais elle ne se réduit pas à cette composante. Quand il est proposé un rapprochement entre les enseignants du secondaire et ceux de l’université, il faut permettre l’apparition de conditions favorables à un tel rapprochement. Le combat contre les stéréotypes sexués est essentiel, mais si une politique de sensibilisation telle qu’elle est prévue dans ce plan est nécessaire, il semble également indispensable de donner aux enseignants, hommes ou femmes, la formation pour débusquer ces stéréotypes dans leurs propres pratiques. Les apports de la psychologie cognitive peuvent se révéler essentiels.

Ce plan ne laisse pas la responsabilité de sa réussite seulement du côté institutionnel. Il nous demande de réfléchir à des questions importantes : les programmes, les évaluations, le redoublement, et d’une certaine façon, plus généralement, sur ce que nous voulons que soit l’enseignement (des mathématiques) dans les prochaines années. Le ministère semble souhaiter que la coopération qu’il a commencée avec la communauté mathématique se poursuive. Nous y sommes bien sûr pleinement favorables et nous serons partie prenante des prochaines rencontres qu’il y aura avec les conseillers ministériels. Il est nécessaire que notre association soit une véritable force de propositions, ce qui implique que nous mettions en œuvre rapidement une réflexion sur l’ensemble des aspects soulevés par ce plan.

Bernard Egger et le bureau de l’APMEP
 

 

Article mis en ligne par GC

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