Bulletin Vert n°500
septembre — octobre 2012

Une société intoxiquée par les chiffres Propositions pour sortir de la crise globale

par Marc Delepouve

L’Harmattan, 2011
156 pages en 13 × 21, prix : 16,50 €, ISBN : 978-2-296-55820-5

 

Le titre de cet ouvrage pouvait faire craindre une attaque en règle contre les mathématiques et les mathématiciens ; il n’en est rien.

L’auteur, agrégé de mathématiques, enseignant à l’université de Lille, membre d’ATTAC et du SNESUP, prend pour cible l’obscurantisme scientiste, qu’il oppose à la démarche scientifique authentique, et qui, avec « l’inculture scientifique, […] ont débouché sur un détournement de l’usage des chiffres et des mathématiques en un outil de l’horreur néolibérale ».

Le livre est divisé en trois parties, et six chapitres :

  • I. Société
    • 1. Quantifier, déshumaniser, anesthésier ;
    • 2. Le cas des retraites
  • II. Science
    • 3. Le changement climatique
    • 4. Refonder la recherche
  • III. Politique
    • 5. Union européenne, le projet détourné
    • 6. Se libérer du joug néolibéral

et complété par cinq annexes (textes parus par ailleurs). On trouve de nombreux renvois à des sites Internet.

Entre autres exemples, Marc Delepouve met en évidence l’inanité du classement de Shanghai pour les universités, ainsi que celle du rapport Charpin qui en 1998 prétendait démontrer l’inéluctabilité de l’augmentation de l’âge de la retraite : un calcul basé sur les hypothèses mêmes de ce rapport, et qui pourrait donner lieu à un exercice en seconde, montre que si « les charges de retraite triplent à l’horizon 2040 alors que le PIB et la masse salariale ne font que doubler  », la part du PIB non consacrée aux retraites augmentera tout de même de près de 90% ! De même il s’attaque à la théorie du «  facteur deux  », selon laquelle la solution au réchauffement climatique est la division par deux des émissions de gaz à effet de serre. Il pose le problème de la concurrence entre les organismes de recherche, source de gâchis là où la coopération apporterait économies et efficacité. Il utilise lui-même des données scientifiques chiffrées, aux sources toujours bien précisées, pour arriver à la conclusion que des moyens existent pour dépasser la triple crise financière, sociale et environnementale, mais pas sans mutation profonde de la société et des institutions.

Bien entendu, les options politiques de certains lecteurs les empêcheront d’adhérer à ces thèses. Même si on est globalement d’accord avec l’auteur, on pourra regretter qu’il n’évoque que trop brièvement ce que pourrait apporter une meilleure maîtrise des mathématiques aux citoyens comme à leurs élus ; qu’aux prévisions fantaisistes, il n’oppose pas le calcul de probabilités et d’intervalles de confiance ; que, parlant abondamment du PIB, il ne relève jamais l’absurdité de sa définition, dans laquelle le positif et le négatif s’additionnent sans vergogne (construction d’une usine polluante et dépenses de dépollution, par exemple).

Il n’en reste pas moins que cette dénonciation de l’usage détourné ou abusif des chiffres va dans le sens de la valorisation de notre discipline, et que ce discours, solidement construit et argumenté, est à lire et à méditer.

 

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